Une fois n’est pas coutume, je vous propose de jouer un peu. D’une parce qu’on apprend mieux en jouant (enfin y parait) et de deux parce que c’est ainsi que pratiquent les pédagogues modernes (si tant est que la pédagogie puisse être moderne). En effet, dans la plupart des articles que vous lisez sur votre blog de photo animalière préféré, vous êtes, disons, passifs ! Certes, c’est vous qui lisez, vous qui faites l’effort de suivre mon raisonnement. Mais ! Vous posez-vous quelques questions ? Probablement pas assez.
Alors aujourd’hui, vous allez être acteur de votre apprentissage photographique. Gloups … ça ferait presque peur ! Allez, courage, voici ce que j’attends de vous 🙂
Dans le titre, vous avez lu : 5 astuces pour faire de la photographie nature abstraite. Ok, vous les aurez vos astuces, mais en échange de votre participation. Voici le jeu : je vous présente cinq photos abstraites prises pour les besoins de cet article. Cinq photos utilisant justement chacune des 5 astuces. Pour ces images, nommées fort judicieusement photo-abstraite-1, photo-abstraite-2, photo-abstraite-3 et photo-abstraite-4, photo-abstraite-5, vous tenterez de deviner quelle technique-astuce j’ai utilisé. Indice, il peut s’agir d’un réglage d’appareil et/ou d’un accessoire tout con bête. Compris ? Allez-y vous avez 5 minutes.
Fini ? Bravo. Vous voudriez les réponses tout de suite n’est-ce pas ? Elles arriveront au fur et à mesure dans l’article, pas cachées, non non, bien en évidence en titre de paragraphe.
- Toutes les photos n’ont subies aucun post-traitement. Elles sont brutes de brutes.
- Toutes les photos comportent un élément naturel : fleur ou insecte (un moucheron de 2 mm ça compte !)
Astuce photo abstraite n°1 : L’explozoom (ou coup de zoom)
C’est la technique utilisée pour photo-abstraite-1. Qui a juste ? :-). C’est une solution créative ultra-connue et ma foi qui donne de sacrés bon résultats. Suffisamment en tout cas pour entendre dire par les néophytes « wahou ! Comment tu fais ? T’es un pro toi ! »
Le principe est le suivant : on prends une vitesse de 0,5 s à 3 s (au delà trop de lumière entre et c’est tout cramé, entendre surexposé. Sauf à vouloir justement un tel effet … on est dans l’abstrait!) et on change la focale pendant la pose longue : vous tournez la bague du zoom en même temps que vous prenez la photo. Possible d’aller de la plus longue focale à la plus courte et inversement pour varier les effets.
La multiplication des essais est nécessaire. J’ai dû faire une trentaine d’images pour obtenir les premiers effets sympa. De l’énooooorme avantage du numérique !
Petite astuce : maintenez un très court temps la focale fixe du départ pour obtenir la partie centrale de l’image pas trop floue. Elle se détachera du reste tout « éclaté » de l’image. Et puis vu les vitesses basses utilisées, un trépied est vivement conseillé, surtout si comme moi la fluidité de la bague de réglage de zoom n’est pas exemplaire !
Astuce photo abstraite n°2 : faites du vent un allié
La photo photo-abstraite-2 est prise grâce à ce tour de passe-passe : l‘effet de filé abstrait
En macrophotographie ainsi qu’en proxi-photographie (la macro pas vraiment macro), le vent est l’ennemi n°1. Bouh ! Méchant vent qui fait bouger les végétaux ! 🙂 Ici, plutôt que de pester contre lui, utilisez-le comme un outil, comme allié. C’est ce qu’on appelle la réactivité du photographe. Celui capable de passer de l’état de frustration à l’état de créativité.
Comment faire ? On reprends la même recette que pour l’explozoom … la vitesse d’obturation lente. Donc, dans l’ordre :
- pose de l’appareil sur trépied (ou un mur, ou une caisse, ou …)
- désactiver le mode anti-vibration (et oui, sur trépied, on l’enlève, c’est comme ça, discutez pas 🙂 )
- mode priorité vitesse
- définir au pifomètre une vitesse de base, juste pour voir. 1/4 de seconde par exemple
- déclenchez, contrôlez sur l’écran de … contrôle et ajustez à nouveau la vitesse.
- effectuer ce type de prise de vue plutôt par temps couvert, au lever et au coucher du soleil. J’ai pris cette image en plein midi fin septembre, et malgré mon filtre gris neutre et une fermeture à f/32 (!) j’ai bataillé pour obtenir péniblement la vitesse de 1/6 à une vitesse lente convenable. J’ai même dû attendre qu’un nuage me sauve la mise ! Un vrai temps couvert m’aurais permis de descendre encore plus bas. Tant pis. Je referai.
- dernière chose : à faire par jour venteux ! (ou sinon vous demandez à votre moitié
d’utiliser le sèche-cheveuxde secouer les branches).
Astuce photo abstraite n°3 : la feuille d’alu
La photo photo-abstraite-3 est prise grâce à ce tour de passe-passe.
Quoi ? Une feuille d’aluminium de cuisine ? Celle qui sert à enrober les patates dans la braise du BBQ ? Oui, celle-là même !
Au départ, mon idée était différente. J’espérais utiliser un miroir mais le truc bête, impossible de mettre la main dessus. Un bon carton bien épais entouré du fameux papier alu remplacera donc le miroir (ceci étant, n’essayez pas de vous raser devant mon carton d’alu, coupures assurées 🙂 )
Mon idée était de jouer avec la réflexion du sujet. Obtenir des effets de symétrie notamment. Mais sans mon mirroir, ce plan tombait à l’eau. Alors j’ai contourné cet échec en utilisant l’aluminium comme réflecteur. Et là, je me suis bien marré ! C’est fou le nombre d’expérimentations qu’il est possible de faire avec une feuille d’alu. Voyez sur l’image ci-dessous, l’insecte semble flotter sur son support. La trace plus sombre sur la largeur est juste un pli sur la feuille. Il est possible de varier la texture de l’alu en l’utilisant comme support.
Il est possible aussi de s’en servir, je le disais, comme réflecteur. L’apport important de lumière donne alors les effets les plus surprenants. Un simple pissenlit se transforme en soleil éblouissant !
Astuce photo abstraite n°4 : le flou diffusant
La photo photo-abstraite-4 est réalisée selon cette technique de mon invention. J’avais lu sur un bouquin photo un trucage au doux nom de flou diffusant. Le but est d’adoucir, de lisser l’image comme si on passait sur celle-ci du papier de verre super fin. C’est paradoxal puisque la photo animalière nous demande constamment la recherche de netteté et de piqué. Nous souhaitons ici l’inverse en utilisant un accessoire : le collant en nylon. Pour ceux qui n’auraient pas la chance d’avoir une gentille épouse prête à sacrifier un de ses collants sur l’autel de la photographie abstraite, on peut sans problème utiliser autre chose. Oui, le flou diffusant peut s’obtenir :
- avec un collant ou une bande de gaze tenu par un élastique devant le pare-soleil
- en soufflant sur la lentille frontale de l’objectif afin de déposer de la buée
C’est cette astuce du collant qui m’a le moins emballé. J’ai été vite confronté au problème de la mise au point. Figurez-vous qu’un collant plaqué devant l’objectif rend la mise au point compliquée ! En plus, le résultat n’est pas celui que je préfère. Question de goût. J’ai pourtant essayé différentes couleurs de bas, de percer un trou au milieu du collant tendu pour avoir une zone plus nette, mais non, c’était bof bof ! Et j’en suis quitte pour racheter quelques paires à ma douce chérie qui me préfère finalement à l’affût aux lapins de garenne 🙂 .
Alors je suis passé à l’étape suivante : souffler sur l’objectif. La buée se forme bien, pour ça, aucun problème ! Je n’est pas noté une différence fondamentale avec le coup du nylon. Si ! Il faut faire vite car la buée se fait la malle en quelques secondes. J’avais en tête de simuler un effet de brume. Plutôt réussi !
Astuce photo abstraite n°5 : la sur-exposition
La photo photo-abstraite-5 est selon ce procédé.
Pour cette dernière astuce, point d’accessoires ou de trucage. Un sujet bien choisi, des réglages qui vont bien et le tour est joué. Pour la photo abstraite en dessous, mon choix s’est arrêté sur un insecte : la tipule potagère (espèce de diptère). Et pas n’importe quelle tipule, non. Une très coopérative. Une morte. Je ne l’ai pas froidement tuée, elle était là, sans vie, sur une tige de lavande. Comprenons nous bien, je ne me suis pas levé ce matin là en me disant que je me ferai bien une tipule morte 🙂 . C’est l’occasion qui fait le larron !
Ce sujet devait donc parfaitement me convenir pour mes expérimentations photographiques.
Pour l’image visible ci-dessous, une grosse sur-exposition associée à un point de vue en contre-plongée donne une photo, sinon abstraite au moins particulière ! Je vous avoue que j’ai poussé le vice plus loin encore. J’ai fini par prendre la tipule pour la placer sur le pissenlit-soleil. Sauf que la moitié de l’insecte m’est resté entre les doigts 🙁 .
[…] Image: www.auxoisnature.com […]
Ton article fait écho à ma dernière sortie photo.
La lumière était là mais pas trop la faune, alors armée de mon objectif macro, je me suis rabattue sur la flore avec des images plus abstraites.
J’ai profité des premières couleurs automnales pour shooter les dégradés sur les feuilles, leurs nervures transparentes découpées comme une carte IGN, des effets sur les fleurs ou certains insectes prenaient un bain de pollen, les baies multicolores et vernissées, les plumes des cygnes flottants sur l’eau…
Jouer sur le flou, la profondeur de champs, l’ombre et la lumière la vitesse…
Je vais penser à essayer certains de tes trucs la prochaine fois, merci
Salut Kok,
merci à toi d’avoir pris le temps de partager ton expérience. Tu as raison, la photo abstraite est une excellent école pour travailler les notions de flou/netteté, zone de netteté, vitesse, … Mais que le numérique est génial pour ça ! Le contrôle en temps réel permet de progresser très vite et pour pas cher !
Merci pour cet article ! je vais essayer !
N’hésite pas Dominique à partager tes photos ici en mettant ton lien de partage si tu utilises un service comme flickr par exemple ou autre. A bientôt !
Voilà des astuces très intéressantes merci.
Avec plaisir Thierry ! C’est le très gros avantage du collectif de La Boite à Photos : puisque que le thème est choisi par tous les membres, je suis obligé de m’y conformer, et sans la BAP, je ne pense pas qu’un jour j’aurais écris un article sur la photo nature abstraite !
Une proposition ultra-simple: faire bouger l’appareil !! J’ai fait des photos sympas sur des cascades en me mettant très près de l’eau, avec des vitesses de l’ordre de 2 à 4s et en faisant des balayages très rapides appareil en main … A expérimenter en toutes situations, la variété des mouvements du bras permet beaucoup de créativité !
Merci Pierre pour le partage de ton astuce. Ce que j’ai bien aimé en laissant le vent « faire », c’est le coté surprise, me disant « à quoi ça va ressembler ? »
Merci pour ce sympathique article qui me donne envie de tout expérimenter!
Bonne nouvelle !
Ce que j’ai écrit là n’est qu’une infime partie de ce qu’il est possible d’expérimenter : j’aurais pu aussi utiliser mon sac à dos noir pour créer un fond de fortune, mais aussi un bout de tissu blanc, … on peut tout faire !
Ahahah ! Je ne m’attendais pas à un tel sujet. Et oui, la photo peut être aussi abstraite. Et des fois, c’est vraiment pas mal. J’ai lu en diagonal pour l’instant mais sympa comme article. Marrant ces petits trucs. Je n’avais pas pensé à tout.
Perso, j’ai déjà fait quelques clichés d’abstrait. J’utilisais pour ce faire mon objectif macro en prenant un détail qui isolé n’avait pas vraiment de sens hors contexte. J’ai par exemple une jolie photo de dégradé de rouge et orange qui est en fait une macro d’un cachet de vitamine C qui diffuse dans un verre de grenadine.
Salut Guillaume,
comment ça tu n’as lu qu’en diagonale ? Je suis vexé ! 😉
L’objectif macro est effectivement parfait pour isolé un élément du contexte, idéal pour l’abstrait. Mais quand on en n’a pas, ces quelques accessoires sont bien pratiques !