En lisant cet article, vous découvrirez le détail permettant au spectateur de rester accroché de longues minutes sur une une photographie animalière plutôt qu’une seule seconde.
C’est la 10ème édition du collectif de la boite à photos. 10 déjà ! Même si je n’ai pas participé à toutes, je suis toujours aussi fier et heureux de faire partie d’un tel projet unique dans la blogosphère photo francophone.
Pour ceux qui découvrent le principe de la Boîte à Photos (il y en a encore ? 😉 ) : c’est un collectif de blogs photo francophones se rassemblant tous les 2 mois pendant une semaine autour d’un thème choisi ensemble. Chaque blogueur traite du thème à sa manière et ça donne des articles riches, divers que tout photographe doit lire à tout prix.
Le thème pour cette semaine est : le détail.
Pour la 10ème, qui mieux que l’initiateur de la Boite à Photos pouvait accueillir les photographes du collectif ? J’ai nommé l’ami Laurent Breillat du blog apprendre-la-photo.fr !
Comment connaitre vos meilleures photos
Si vous me suivez via Facebook et/ou Twitter, vous savez qu’il y a quelques semaines j’ai exposé pour la toute première fois. C’était au festival de la photo animalière à Longecourt-en-Plaine. Absolument génial comme expérience : allez-y, osez, postulez, proposez votre travail à des gentils organisateurs d’exposition, ça vaut le coup ! Rendez-vous compte, trois jours durant sans discontinuer, j’ai discuté, échangé, partagé … respiré photo nature et animalière.
Mais pas que. J’ai aussi longuement observé. Qui ? Les sympathiques visiteurs. Ca ne m’a pas demandé beaucoup d’effort car c’est dans ma nature, j’aime bien observer les gens. Bon, là, par contre, avec un objectif très précis : découvrir quelles étaient mes photos qui retenaient le plus l’attention des spectateurs. Car ne comptez pas sur Facebook pour vous le dire. Comprenez que ça n’est pas le nombre de J’aime qui vous fera connaitre le vrai niveau de vos photos. Non, c’est l’attitude des gens au contact réel de vos images.
J’ai donc prêté énormément d’attention à la manière qu’ont eue les visiteurs de regarder mes images. Vers lesquelles s’arrêtent-ils ? Lesquelles regardent-ils rarement ? Certaines les laissent-ils indifférents ou au contraire, attisent la curiosité et les regards ? Je ne suis pas allé jusqu’à prendre des notes de mes observations. Mais à la fin des trois jours, je connaissais les 2 photos qui sortaient du lot. Et bien sûr les 6 autres qui tombaient de facto dans la catégorie des « quelconque ».
Savoir pourquoi certaines photos ont du succès
Bon, c’est bien joli tout ça, de connaitre dans sa photothèque les images qui fonctionnent. Mais ça n’est pas suffisant. Car la VRAIE question c’est de comprendre pourquoi certaines attirent le regard, le retiennent même, alors que d’autres non. Quel DETAIL a retenu longuement l’attention des visiteurs ? (hi hi hi c’est le titre de l’article 🙂 ) ?
Alors j’ai poussé la réflexion encore plus loin. J’en suis venu à élaborer une théorie implacable, limite scientifique sur le classement des photos. Je me demande même si je ne vais pas déposer le concept 🙂 .
Catégorie 1 : les photos naturalistes
Ce sont les photos qui n’ont pas d’autres rôles que de montrer la nature à l’état brute, sans la distorsion artistique ou esthétique du photographe. En gros, elles sont utiles mais pas belles. Aucune de mes images entrant dans cette catégorie n’étaient exposées à Longecourt-en-Plaine, ça va sans dire.
N’attendez pas à faire sortir la moindre émotion chez celui qui les regarde. Au mieux vous aurez un « ah d’accord, c’est comme ça que ça se passe », au pire, rien du tout. Mais ça n’est pas grave. L’intérêt de cette catégorie est de mémoriser l’aspect biologique de la faune.
Je prends régulièrement des photos animalières de ce type. Ca m’est très utile pendant la phase d’observation. Je me place à bonne distance de la scène, à bon vent, et je regarde ce qui se passe. Et parfois je photographie pour me souvenir et commencer à élaborer une stratégie d’affût future.
Cette catégorie concerne à peu près 10 % de ma photothèque. Des photos que vous ne verrez clairement jamais ! Enfin si, pour cet article 🙂
Catégorie 2 : les photos esthétiques
Ce sont les photographies animalières qui sont belles. Tout simplement. Vous savez bien, celles qui sont esthétiquement réussies et pour lesquelles on ne peut rien reprocher. Bonne composition, bien cadrées, la ligne directrice qui va bien pour guider le regard. On a aussi « Toucekifo » côté technique : netteté au poil, piqué du tonnerre. Clairement les réglages sont maitrisés pour cette catégorie.
Je reviens à mon expo. J’avais huit photos présentées. Huit photographies choisies par mes soins (sans blague !). Forcément elles me plaisaient !! Parmi ces huit, six appartiennent à cette deuxième catégorie (dont vous avez un échantillon ci-dessous). Elles sont belles non ? Toucekifo en composition et Toucekifo en technique.
Pourtant, ces images sont celles qui ont le moins accroché le regard du public. Je ne m’imaginais pas ça avant l’exposition. Tiens, prenez la photo du lapin de garenne en gros plan. Moi je l’aime beaucoup celle-là. Sans conteste une de mes préférées de toutes. Depuis le début d’ailleurs. Pourtant, les gens la voyaient, mais ne regardaient pas.Vous saisissez la nuance ? A la louche, c’est 85 % de ma photothèque.
Perso, avant cette expo, le critère d’une photo réussie se résumait seulement aux deux aspects esthétiques et techniques. Ca, c’était avant. Car depuis Longecourt-en-Plaine, j’ai découvert une nouvelle catégorie. La troisième. Celle des photos qui ont LE DETAIL qui retient l’attention.
Catégories 3 : les photos qui retiennent longuement l’attention
Et bien voilà. Nous y sommes. J’ai l’honneur de vous présenter la nouvelle catégorie que j’ai inventée et à laquelle personne n’avait jamais pensé. C’est la catégorie des photos-devant-lesquelles-on-reste-longtemps-parce-qu’il-y-a-un-détail-qui-nous-retient.
Mon expo encore : sur les huit, seulement 2, à mon sens, méritent d’être classées ici. Je vais vous dire maintenant pourquoi. Et surtout quel est ce détail qui fait toute la différence. Ce détail est l’imagination. La capacité qu’à une image à déclencher chez le spectateur le plaisir de s’imaginer des centaines d’histoires possibles.
Voyez cette photo ci-dessous. C’est celle qui a retenu le plus l’attention des visiteurs. Car elle possède le détail. Elle donne l’occasion de faire raconter une histoire à la scène. Ca peut-être tout simplement s’imaginer pourquoi le lapin sent l’ortie. C’est simple, enfantin, mais ça fait toute la différence. Ce type de photos représente 5 % de toutes mes photos. C’est peu hein ?
Et maintenant place au maitre des maitres. Vincent Munier. Au regard de ce que je viens de vous dire, j’ai compris pourquoi la première fois que j’ai vu cette image de combat entre un héron et une buse je suis resté de trèèèèèès longues minutes devant. Parce qu’elle m’a fait imaginer la scène au delà du moment saisi. Pourquoi cette bataille ? Qui gagne ? Et comment en sont-ils arrivés là ? Que va-t-il se passer ensuite ? Qui est le plus fort ? La buse avec ses serres ? Le héron avec son bec ?
Pensez-vous qu’il soit possible de se poser autant de questions avec mon portrait de lapin de garenne vu plus haut ? Non, c’est impossible. Car elle ne raconte rien. Elle est « imaginairement » plate. Je pourrais dire belle mais creuse.
Alors maintenant, faites-moi plaisir. Allez faire un tour dans votre photothèque et trouvez les images qui rentrent dans cette 3ème et ultime catégorie. Et si vous voulez vraiment, mais alors vraiment me faire plaisir, à chaque fois que vous photographiez, pensez à ce détail. Qui, vous l’avez compris, n’en est finalement pas un ! Faites déclenche l’imagination de vos spectateurs !!
Merci Régis pour les conseils, le partage de tes conseils et ton super site… 😉
C’est très personnel mais j’aime plus le lapin que la bataille d’oiseaux, on ne pourrais pas savoir qu’il y a une buse si ce n’était pas dit… Je suis plus figuratif et d’ailleurs c’est peut être bête mais je préfère le renard, cette photo me touche plus encore que celle du lapin, l’expression du renard est incroyable, couché, la fin de la détente, avec le point de vue c’est comme si il venais juste de se réveiller et qu’on était une petite souris qui avais couiner à coté lui… Tout son regard se porte sur nous, on est aspiré, il nous a vu et il va nous manger.. Génial 🙂
Bonjour Régis,
Très bel article, qui m’invite à la réflexion… merci du partage…
Sonia
Bonjour Régis,
Ca faisait longtemps… mais je ne reçois plus d’alerte (de mail) sur la publication de nouveaux articles.
Celui-ci est très intéressant, comme bien d’autres et donne à réfléchir.
J’ai un avis mitigé sur ton retour d’expérience, car même si je suis d’accord avec toi sur l’accroche du public avec une photo qui raconte une histoire, ce ne doit pas être, à mon avis, le seul intérêt que doit présenter une photo.
En effet, peut être que de nombreux visiteurs se sont arrêtés devant, mais ce n’est pas pour cela qu’ils l’ont plus apprécié et qu’ils auraient « payé » pour la voir : l’auraient-ils accroché sur l’un de leurs murs ou auraient-ils préféré celle du renard ? Achèteraient-ils un bouquin comprenant que ce type de photos ?
Je ne suis pas dans le marketing, mais il faut peut être un tout dans une expo ou dans un livre : la catégorie 3 va peut être interpeller le public (être un produit d’appel) qui les fera s’attarder sur le stand puis découvrir et apprécier celles des autres catégories ou discuter avec l’auteur.
Toujours est-il qu’une photo qui présente à la fois les caractéristiques 1, 2 et 3 est le summum et c’est sans doute ce que réussit Vincent Munier : un lieu, une espèce, de l’esthétique et une histoire !
Salut Stéphane,
merci à toi d’avoir pris le temps d’écrire ton avis et de nous en faire part 🙂
Excellent article, et pour la photo du lapin de garenne (avec le détail) c’est vrai qu’elle nous invite au rêve. Merci et belle soirée.
Bonsoir,
Superbe cet article, j’ai adoré le lire!
Je me situe dans la cat 2 également, je viens de regarder mon portfolio 2013 et je viens de comprendre réellement pourquoi celle ci plaît davantage que celle là! Effectivement il faut que la photo raconte une histoire, même si cette histoire ne va pas chercher bien loin! C’est pas évident de capter ce genre de photo mais quand on réussi c’est le bonheur total! L’année dernière j’ai réussi à photographier une belle saltique, et à faire une photo qui me plaît énormément, je me permets de la partager : http://www.flickr.com/photos/lutecia88/9152393937/
On voit que la saltique regarde en bas et se demande si elle sotte ou pas, et cela fait toute la différence 🙂
Merci pour cet article!!
Lydie
Bonjour Régis
J’aime bien les photos qui racontent une histoire ou suscitent des questions…. et si j’avais été à l’exposition j’aurai surement regardé longuement le petit renard…..mis à part le fait qu’il est mignon comme tout, je me serai dit : il a surement vu le photographe…..que va t-il faire…..à t-il peur….que pense t-il ??? son cœur bat-il plus vite ?
Bon, enfin c’est toujours ce que je me dit quand je vois un animal qui a le regard fixé vers l’endroit où se trouve le photographe…..c’est comme ça…..
Merci pour ces belles photos, et bonne journée
Bonjour Regis, je découvre ton site en meme temps que ton article par le biais de Laurent B., merci pour cette piqure de rappel et bravo pour tes clichés, j’aime beaucoup le lapin et l’ortie…
Merci à toi Anne-Sophie d’avoir laissé ce sympathique message … à bientôt !! 🙂
Je ne me souviens plus quel grand photographe a dit : le plus difficile en photo, est le premier million d’images; après, ça va tout seul ! Çà nous laisse de l’espoir ! J’aime bien la photo du lapin qui renifle l’ortie; personnellement, j’aurais cadré plus serré …. si cela était possible (zoom à fond, trop éloigné, pas le bon objectif sur l’apn …). On ne peut pas tirer « la photo » à chaque fois que l’on déclenche, à moins d’être un expert, d’où le plaisir que l’on a, à réussir, de temps en temps, une très belle photo. Pour moi, l’important est de me balader, et si, il y a photo, alors, c’est super.
[…] son article, Régis du blog Auxois Nature nous donne envie de lire les autres posts sur le même thème ! En […]
Ce que tu décris là : l’image avec » le détail qui tue », c’est ce que moi j’appelle l’image qui « raconte une histoire ».
Comme tu le dis, dans une belle photo chacun doit en plus y trouver son compte . C’est comme cela qu’elle passera en cat 3
Oui, c’est vrai que j’aurais aussi pu appeler cette catégorie » les photos qui racontent une histoire » . L’essentiel est que le photographe sur le terrain sache ce qu’il recherche pour captiver le spectateur.
Super de rappeler ce « détail ».
En effet, lorsqu’on commence la photo on obtient des photos de catégorie 1, puis on évolue et on est très content d’avoir « quelques » photos de la catégorie 2.
Un jour, on visite une expo et on est déçu de voir que finalement c’est pas encore ça, nos photos sont « un cran » en-dessous et c’est bien là dans CE détail, dans CETTE chance qu’il faut cultiver,d’être là au bon moment au bon endroit que la différence va se faire.
Personnellement je pense quand même que ce genre d’images ne restera toujours qu’un pourcentage infime de notre photothèque mais ce seront CES photo-là qu’il faudra sélectionner pour une expo laissant les autres pour notre plaisir personnel.
C’est un très bon rappel en tout cas.
Salut,
oui, le taux d’images appartenant à la 3ème catégorie sont assez peu nombreuses. Et je suis quasi certain que c’est le cas même chez les grands photographes.
Et tu fais bien de rappeler que passer d’une catégorie à une autre est un bon moyen de situer sa progression !
Excellent article, très pédagogique. Bravo.
Merci 🙂
Article de très belle qualité, je suis scotchée ! Tant par le résultat que la démarche. Outre le fait, que je ne suis pas sûre d’avoir beaucoup de photos qui attirent l’attention comme celles la, je trouve que ce sont les plus dures à faire car elles capturent un instant seulement…
Salut !
Merci à toi pour ton commentaire qui me fait très plaisir 🙂
Clairement, ce sont les images les plus dures à réaliser, mais aussi celles qui apportent le plus de satisfaction à celui qui les a prises et à ceux qui les regardent donc …
bonjour
encore faut il savoir si on fait des photos pour soi et son
plaisir ou pour que le plus grand nombre de personnes
dont le regard n a pas été éduquer s extasie devant une
photo moyenne avec un detail amusant ! la photo du renard
est tres belle , celle du lapin qui sniffe amuse les enfants !!
Pas faux, c’est sur que si je fais des photos dans le but d’une expo, je vais plus tendre vers des images de la catégorie 3. Mais si c’est pour montrer à mes proches ce que je vois de mes promenades alors celles de la cat. 1 ou 2 suffisent 🙂
C’est peut-être pour ça que la « grande enfant » (de 68 berges…) que je suis restée s’est arrêtée, à Longecourt, sur cette image… Pour moi elle a quelque chose d’autre que la photo précédente du lapin, même s’il est mis en valeur par un joli bokeh . Elle présente un attitude de l’animal moins « déjà vue ». Peut-être que tout en voyant une partie du milieu naturel, j’aurais préféré un cadrage plus serré, supprimant la partie blanche en haut à droite, et surtout permettant de voir le lapin d’un peu plus « près » avec cette lumière en contre-jour qui souligne sa tête et sa fourrure ? Je ne sais pas. Mais en tout cas l’attitude me plaît beaucoup. C’est une « tranche de vie » de l’animal qui explore son milieu avant de s’en nourrir, alors que la photo précédente est simplement un portrait plus « ordinaire », plus « figé ». Et comme dit Régis, avec cette photo, on se plaît à « imaginer » la journée du lapin qui sera faite, probablement, de toute un succession de ces explorations…
En conclusion j’ai donc fait hier de belles images… dont la plupart sont effectivement creuses, mais au final, pas toutes, alors je suis d’autant plus contente !
Merci pour ces explications simples, claires et précises.
G.
Salut Gaelle,
ces fameuses images de la catégorie 3 sont les plus dures à obtenir alors bravo si tu as pu le faire. Perso, il m’arrive très très souvent de revenir d’une session de photo et de ne pas en avoir !
Mais il faut persévérer … mais pas s’obstiner !
Je ne recherchais rien de particulier non plus, autre que faire des portraits… c’est la chance du débutant, comme on dit !! 🙂
De plus la faune photographiée n’était pas très sauvage (volailles et équidés) ce qui facilite grandement l’approche de l’animal 😉
Bon article qui fait réfléchir à ce qu’est une bonne photo. Merci Régis
C’était le but de l’article effectivement. Content que ça ait marché pour toi Pascal 🙂 Maintenant il faut passer à l’action !!
Génial.
Il est vrai que la différences entre les photos de ton article sont flagrantes… une fois que tu nous explique ton analyse.
Ces différences ne me sautaient pas aux yeux avant que je fasse mon expo. Comme quoi, il faut parfois des éléments déclencheurs pour se rendre compte de certaines choses !!
Hello perso je préfère ta photo « détail qui change tout » à celle de vincent munier…
Ah ben alors ça … bon ben alors je le prends comme un compliment 🙂 🙂
Très intéressant ! Merci Regis de partager ton expérience et de « déclencher » en nous de joyeuses perspectives d’avenir dans la photo !
Merci Marie !! D’ailleurs, ce que j’explique dans l’article (déclencher chez le spectateur l’envie de s’imaginer) est valable pour tous les domaines de la photo ! Portrait, photo de rue, photo de studio …
il suffisait d’y penser !
ça parait évident quand on regarde les photos présentées en exemple,
mais à part être professionnel de la photo, on a peu de chance de tomber la-dessus en billebaudant un dimanche matin …
je retiens l’idée, le détail , c’est ce qui manque toujours à mes photos…
En billebaudant non. En tout cas c’est plus difficile, je pense qu’à l’affût pour choper l’attidude et le détail décrit dans l’article.