Dans cette interview du photographe animalier Guillaume Collombet, vous apprendrez :

  • des techniques pour filmer les animaux sauvages
  • des astuces pour photographier les animaux à la montagne
  • comment fonctionne l’école de cinéma animalier, l’IFFCAM
  • comment Guillaume s’y est pris pour monter son projet de documentaire animalier

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Vous pouvez retrouver tout le travail de Guillaume Collombet sur son site internet en cliquant ici. 

La photo animalière à la montagne

Guillaume Collombet est un jeune photographe animalier qui vit dans les Alpes. Il est né, a grandi et vit actuellement dans ce massif montagnard. Dès son plus jeune âge Guillaume a toujours été attiré par la nature et les animaux. Certes, cette phrase est très (trop ?) convenue et on a coutume de la sortir à toutes les sauces. Mais quand c’est la vérité, par la peine de tourner autour du pot pour dire ça. 🙂 Guillaume est un amoureux de la nature, un vrai !

Ceci étant dit, il vaut mieux aimer la nature en plein coeur des Alpes qu’en plein coeur de Paris. Même s’il existe de très beaux parcs et des belles forêts dans la capitale, l’immersion dans le monde sauvage n’est pas tout à fait la même à mon avis.

Une chance donc pour Guillaume que d’avoir toujours eu seulement à sortir le bout de son nez du pas de la porte pour être dans la nature sauvage et à peu près préservée. Dès ses premières sorties, il a ressenti le besoin de partager à ses proches, puis au plus grand nombre, ses observations, ses découvertes. La photographie était alors l’outil idéal pour ramener ses trophées numériques.

Le temps passé sur le terrain, le talent aidant et une farouche volonté de sortir des images pleines d’émotion, Guillaume n’a pas mis longtemps à se faire un nom dans le milieu de la photo animalière. Il commence à trouver son style, à imposer sa patte. Il le dit lui-même, le jeune photographe qu’il est cherche avant tout à partager l’émotion du moment.

Exit donc les clichés naturalistes et descriptifs. La galerie de son site internet en est la plus belle illustration. Il a même poussé la démarche jusque dans le classement de ses photos. Là où dans 99 % des cas les photographes animaliers font des catégories par Espèces animales, lui, propose des catégories par Ambiances. Et ça change tout ! C’est une excellente idée dont devraient s’inspirer de très nombreux photographes animaliers qui ont un site internet.

Un exemple ? Vous naviguez dans sa galerie de photos animalières à travers des thèmes comme Pénombre, Brouillard épais ou encore Tempête de neige. Bien joué  !

Un photographe animalier pas comme les autres

Tous les photographes animaliers sont différents! Chacun animalier possède un truc (ou plusieurs !) qui le distingue de ses confères. Les signes distinctifs de Guillaume sont multiples. Tout d’abord il a fait ce que très peu de photographes ont fait, il a suivi l’unique formation en France pour apprendre à filmer et à photographier les animaux sauvages : l’IFFCAM. C’est une école de cinéma animalier située dans les Deux-Sèvres.

Guillaume a évidemment beaucoup appris sur le terrain comme nous tous, mais il possède aujourd’hui un bagage technique, théorique et pratique qu’il n’aurait pas eu autrement. Et puis cela lui a permis de se constituer un réseau de travail que j’imagine très appréciable.

Cela m’amène logiquement à vous parler de l’autre signe distinctif de Guillaume : c’est aussi (et surtout ?) un cinéaste animalier. Il est en plein tournage de son premier long métrage documentaire : Le Lièvre Blanc – Histoire de photographe animalier. Une aventure humaine et photographique qui se déroule au coeur des Alpes et dont les deux héros sont le lièvre blanc évidemment mais aussi lui-même. Au travers de ce film, Guillaume souhaite montrer ce qu’est le quotidien d’un photographe animalier.

Un vrai beau projet dont le résultat risque d’en surprendre plus d’un ! Regardez ci-dessous quelques extraits de tournages. C’est à voir ! Pour soutenir le projet de Guillaume, rendez-vous sur cette page. 

Le premier épisode

Le dernier épisode

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Retrouvez ci-dessous la transcription texte de l’interview :

Régis Moscardini : Bonjour Guillaume Collombet.

Guillaume Collombet : Bonjour Régis.

Régis : Bienvenue à toi dans la série d’interviews d’Auxois Nature et un grand merci d’avoir accepté mon invitation.

Guillaume : Merci à toi pour cette proposition.

Régis : On commence tout de suite. Guillaume, tu as dû faire l’exercice un paquet de fois maintenant, j’imagine, mais c’est un passage obligé. Pour que les auditeurs puissent bien te connaitre ou en tout cas mieux te connaitre, est-ce que tu peux s’il te plait te présenter en quelques mots ?

Guillaume : Moi, c’est Guillaume Collombet comme tu l’as dit. Je suis originaire des Alpes, de la vallée de la Maurienne, la plus longue vallée des Alpes. J’ai vraiment grandi au cœur des montagnes. Depuis que je suis gamin, je parcours ces sommets pour découvrir la nature et petit à petit je me suis intéressé à l’image, à la photo et la vidéo.

Régis : D’accord. Donc tu es un montagnard pure souche, tu l’as dit, tu es né là-bas. Tu randonnes depuis ton plus jeune âge dans la nature sauvage. Mais ce n’est quand même pas suffisant pour devenir un photographe animalier évidemment. Il y en a d’autres qui aussi sont nés en montagne, qui aussi font des randonnées mais ne sont pas devenus photographes animaliers. Quel a été l’élément déclencheur pour toi, pour cette passion ?

Guillaume : J’avais la chance de voir beaucoup d’animaux, des fois des rencontres qui étaient assez rares avec des espèces qu’on ne voit pas souvent.

Régis : Comme quoi par exemple, comme lesquelles ?

Guillaume : Je ne sais pas, pas souvent par exemple c’est le tétras-lyre, le coq de bruyère, des choses comme ça, le gypaète barbu au début de sa réintroduction, c’était très rare tout ça. Souvent je rentrais avec des souvenirs plein la tête, j’en parlais parce que j’étais vraiment passionné de ces observations naturalistes que j’avais pu faire. En fait je trouvais ça dommage de ne pas avoir les images que je pouvais montrer à d’autres personnes, simplement pour témoigner de ces belles rencontres que j’avais pu avoir dans la nature.

Petit à petit j’ai pu rencontrer des photographes locaux, des gens qui faisaient ça en amateur mais qui étaient très passionnés. Quand ils ont vu mes images, quand j’étais jeune, je devais avoir 11-12 ans, je pense, quand j’ai commencé tout de suite avec un petit numérique, ils m’ont dit Guillaume, on va essayer de te monter un blog. En informatique je ne connaissais pas grand-chose. Ils m’ont poussé un peu à partager mes photos sur un petit blog sur Internet. Très vite j’ai eu des bons retours qui m’ont encouragé à continuer, à persévérer dans la photo de nature.

Régis : On ne l’a pas précisé et tu ne l’as pas dit non plus quand tu t’es présenté un petit peu mais tu es vraiment un jeune photographe, tu as 23, c’est ça ?

Guillaume : 24.

Régis : Du coup, j’ai une petite année de retard. Tu as 24 ans, n’empêche que tu es très jeune. Tu es vraiment de la génération numérique, tu n’as connu que ça ?

Guillaume : Oui. Les personnes avec qui je partageais un petit peu la photo au début étaient encore parfois en argentique. Mais c’est vrai que moi j’ai commencé tout de suite avec un petit compact numérique.

Régis : Au départ, tu avais sûrement des prédispositions parce que tu as fait de belles photos en étant tout jeune. Mais qu’est-ce qui te plait vraiment dans la photo animalière, est-ce que c’est le moment du déclenchement, est-ce que c’est en amont, c’est le pistage de l’animal, c’est l’accession au site parce qu’il y a une grosse partie rando qui doit peut-être te plaire aussi, est-ce que c’est tout ce qui se passe après c’est-à-dire exposer tes photographies pour voir le plaisir des gens à voir ton travail ? Quelle est la raison qui te pousse à faire cette activité ?

Guillaume : Je pense que c’est déjà un ensemble de tout ça, toutes ces petites choses qui s’accumulent et qui font la photo animalière.

Régis : Que l’on découvre au fur et à mesure.

Guillaume : Voilà. Mais ce que j’aime déjà, c’est d’être dehors, me retrouver dehors tout seul dans des grands espaces pour vraiment profiter de la nature. Après il y a les rencontres avec les animaux bien sûr qui sont souvent assez fortes, ça me plait beaucoup. Et surtout arriver à les voir sans les déranger, quand on arrive à s’effacer, à disparaitre dans le milieu, qu’on a l’animal qui a un comportement vraiment naturel, je pense que ça se voit dans les images quand il n’est pas inquiet en train de regarder, quand il fait sa vie, et qu’on compose avec tout ce qu’il y a autour, je crois que c’est là où ça devient un petit peu magique dans les photos.

Après ça me plait aussi de les partager parce qu’on est souvent tout seul en montagne et j’aime beaucoup ça, mais après il y a ces autres parties où l’on rencontre beaucoup de monde, et là d’échanger autour de cette passion, c’est vraiment intéressant.

Régis : C’est un peu particulier comme activité, comme métier parce que c’est d’ailleurs le cas pour beaucoup de photographes animaliers, c’est-à-dire qu’on aime beaucoup être seul dehors dans la nature, il y a vraiment une grosse partie en solitaire mais il y a aussi une autre partie, un autre pan du travail où on est amené à voir beaucoup de gens pendant les expositions pour présenter son travail. Ces deux activités sont très différentes et en même temps j’ai l’impression que tu t’en sors plutôt bien, tu aimes aussi le côté social de l’activité, non ?

Guillaume : Voilà. Moi, c’est une des façons que j’ai trouvée pour m’en sortir parce que maintenant j’en vis, ça fait un an quasiment que je fais à la fois de la photo et des films, du cinéma animalier. Pour arriver à m’en sortir, il faut arriver à vendre quelque part son activité, à valoriser son travail photo. Du coup, c’est important d’avoir plein de contacts, d’arriver à montrer son travail.

Moi j’aime bien le côté un peu artisanal, pour le cinéma faire moi-même des petites projections dans les villages de montagne, dans des festivals un petit peu partout en France ou ici dans les stations de ski, et rencontrer directement le public qui peut venir voir ces films ou voir mes expositions de photos, pour vraiment créer un échange. C’est vraiment ce que je trouve intéressant.

Régis : Quelle formation tu as ? Tu as vraiment appris sur le tas ou tu as quand même fait une école ?

Guillaume : Au niveau photo c’était vraiment une passion au début et puis j’ai progressé quasiment tout seul. J’ai essayé de me mettre dans des petits clubs photo locaux. Mais c’est vraiment en retournant souvent sur le terrain, en essayant des réglages, des fois ça marchait, des fois ça ne marchait pas. Petit à petit j’ai évolué en photo. Mais moi, ce qui me passionnait vraiment, c’était la nature.

Bien que j’aimais déjà ce travail de l’image, je n’imaginais pas arriver à vivre un jour de la photo animalière ou du moins oser essayer. Du coup je me suis lancé d’abord dans des formations plutôt dans l’environnement. J’ai fait un BTS pour être garde-forestier, donc un BTS de gestion forestière. Après j’ai poursuivi avec un BTS gestion, protection  de la nature. Ça m’a amené à un équivalent de licence et j’ai pu intégrer l’IFFCAM qui est une école unique en Europe. C’est la seule école publique pour faire du cinéma animalier.

Régis : Qui est situé dans les Deux-Sèvres, c’est ça ?

Guillaume : Dans les Deux-Sèvres, c’est ça.

Régis : Pour situer, il y a une grosse ville à côté ?

Guillaume : Il y a une petite ville, mais qui est connue pour ceux qui font du film animalier, c’est Ménigoute, il y a un festival du film animalier de Ménigoute, l’année dernière c’était les 30 ans du festival.

Régis : En gros, c’est vers Niort, Poitiers ?

Guillaume : Voilà, c’est ça. Et à partir du festival ils ont décidé de monter cette école dans la petite campagne de Ménigoute qui est rattachée à l’Université de Poitiers.

Régis : Une petite précision. Tu as dit que ça t’avait ouvert les portes pour l’IFFCAM d’avoir passé un BTS par exemple. Est-ce qu’il faut justifier d’une certaine formation naturaliste ou tout le monde peut accéder à cette école-là ?

Guillaume : Pour cette école, je crois que ce qu’il faut vraiment arriver à montrer, c’est qu’on est passionné, qu’on a envie de passer du temps dehors, qu’on s’intéresse à la fois et à la nature et à l’image, à l’audiovisuel. Il y a une formation pour photographe qui est un diplôme universitaire et un master pour le côté vidéo. On peut faire les deux ensemble.

Régis : C’est une formation qui est très bien, qui t’a appris plein de choses dont tu te sers régulièrement dans ton travail au quotidien ?

Guillaume : Oui, ça m’a apporté pas mal de choses parce que la vidéo c’est encore plus complexe que la photo, parce qu’il y a tout le travail du montage qu’on fait. Ça peut être proche de la photo de nature au début au niveau des repérages, du temps qu’on passe dehors, d’arriver à voir les animaux et à saisir les images. Mais après il faut savoir raconter des histoires, il faut savoir monter les films, il faut savoir faire de la prise de son, arriver à tout mettre ensemble pour sortir une vidéo à la fin.

Dans ce sens ça m’a beaucoup appris. Ce qui est intéressant dans cette école, c’est qu’on a beaucoup de professionnels, de gens qui travaillent dans le métier, qui viennent nous apprendre un peu leur spécialité, que ce soit des ingénieurs du son, des réalisateurs, des cinéastes, etc.

Régis : Tu es amené à photographier souvent les animaux dans la neige, particulièrement en ce moment on est au mois de février. Est-ce qu’évoluer dans un environnement tout blanc t’impose des contraintes particulières, j’imagine que oui, ou non tu peux finalement utiliser le même matériel que ce que tu utilises d’habitude dans un milieu plutôt vert et plutôt marron ?

Guillaume : En fait il y a plusieurs choses. Même s’il n’y a pas de neige, en montagne déjà on pense par le poids, on essaye d’avoir le moins de choses possibles dans le sac à dos.

Régis : Ça, c’est la première contrainte.

Guillaume : Pour aller le plus loin possible, c’est la première contrainte. On est beaucoup moins libres dans nos déplacements dès qu’on est chargé, en plus avec l’altitude, tout ça, les efforts ils sont plus durs, dès qu’on est chargé c’est très compliqué. Après dans la neige, on est obligé de se déplacer soit en raquettes soit en skis de randonnée, du coup ça peut faire un peu plus de bruit pour faire des approches, ça dépend si la neige elle est poudreuse ou pas, selon s’il vient de neiger ou selon si la neige elle a déjà gelé, on a du mal à se déplacer sans faire de bruit, ou à l’inverse ça étouffe les sons.

Ça peut dépendre selon la météo. Après il y a le camouflage aussi qu’il faut adapter. Donc on n’est pas forcément tout blanc, on peut être blanc avec des taches grises, noires ou même un petit mélange, mais c’est vrai que tout ce qui est vert, marron ressortira peut-être un petit peu plus qu’un camouflage où il y aura des petites taches blanches qui correspondent à la neige. Par contre ce que je trouve très beau, c’est que n’importe quel animal qu’on prend dans un décor de neige, même si moi je suis des fois plusieurs mois de l’année voire quasiment la moitié de l’année les pieds dans la neige, je ne m’en lasse pas de voir ces décors tout blancs qui changent chaque jour, parce qu’elle fond ou elle se redépose de nouveau, tout ça, ça évolue.

C’est très beau au niveau artistique. Je ne m’en lasse pas de voir toute cette neige. Par contre après il y a quelques contraintes, par exemple les risques d’avalanche, on en entend pas mal parler en ce moment. Donc ça, ça limite les déplacements à certains secteurs, il y a des zones où on ne peut pas se permettre d’y aller trop souvent, ou on ne peut pas y aller du tout si on ne veut pas prendre de risque. Après, c’est plus connaitre ce milieu qui est assez particulier.

Régis : C’est sûr que la montagne c’est toujours dangereux tout au long de l’année. Tu es en contact avec des guides de haute montagne, avec les services météo ? J’imagine que tu dois régulièrement prendre contact avec eux pour savoir où tu peux aller et ne pas aller.

Guillaume : Oui, j’en connais pas mal mais après c’est vrai que rien qu’en regardant les météos sur Internet et en connaissant très bien un secteur, en fait on n’a pas besoin d’aller très loin. Moi j’ai la chance d’avoir un petit chalet en montagne qui est au-dessus où j’habite, dans un coin assez isolé, où il n’y a pas grand monde. Depuis 24 ans maintenant, depuis que je suis gamin je vais là-haut, des années je découvre encore des espèces dans la forêt qui est autour du chalet ou dans les versants qui sont au-dessus.

Donc quand on passe beaucoup de temps à un endroit, on commence à vraiment s’imprégner du milieu et à bien connaitre comment fonctionnent les animaux. En fait la nature elle nous surprend toujours, il y a toujours des choses à découvrir. Donc il n’y a pas besoin d’aller très loin. Si on se concentre sur une petite zone qu’on connait, plus on la connait et plus on sait, là je ne peux pas y aller, il y a des avalanches, ou là c’est intéressant à cette époque parce que tous les animaux viennent manger ici parce que la neige, elle les empêche d’aller à un autre endroit, etc.

Régis : Ce que tu dis là, c’est évidemment valable pour n’importe quel type de milieu, n’importe quel type d’environnement, pas forcément que la montagne.

Guillaume : Oui, partout. Juste à côté de chez soi, même pour ceux qui font de la macro, dans leur jardin il y a déjà un terrain de jeu formidable qu’on peut exploiter au fil des jours, pour connaitre mieux les lumières, tout ça, ça va être super.

Régis : Bien sûr. On va parler un peu de ton matériel. Quelle marque as-tu choisie, quels objectifs ? Toujours avec cette petite chose en tête, l’impératif lié au froid, est-ce que dans tes choix d’objectifs, tes choix de marque ou d’appareil, est-ce que tu avais justement cette idée-là de protection par rapport au froid ou de robustesse par rapport au froid, des conditions des fois un petit peu extrêmes ?

Guillaume : Pas spécialement parce que je pense que dès qu’on est dans des boitiers qui sont assez bons, ils sont à peu près équivalents, je pense qu’il y a des boitiers pro qui tiennent quand même très bien. Après on peut mettre des housses de protection  en plus dessus. Après, le froid il ne crée pas forcément de gros problèmes sur les objectifs ni rien, c’est plus sur les batteries. Le froid, c’est vraiment les batteries qui passent beaucoup plus vite, qui se déchargent assez rapidement.

Régis : Toi, tu as plusieurs jeux de batteries à chaque fois.

Guillaume : Plusieurs jeux de batterie, là on n’a pas trop le choix. En une journée, 3 ou 4 batteries peuvent passer, s’il fait -15, -20, ça peut aller vraiment assez vite. Après, ce qu’il faut juste se méfier, c’est les écarts de température, c’est-à-dire quand on est allé  faire des photos toute la journée dehors, il fait -15, on rentre chez soi, il fait 20°, le matériel il faut lui laisser le temps de s’adapter et ne pas tout sortir tout de suite, sortir les cartes, sortir l’appareil, tout ça, sinon on peut peut-être créer des petits problèmes de condensation.

Je n’ai jamais eu de problèmes, mais je pense que c’est plus les écarts qui sont gênants que vraiment être dans le froid tout le temps. A part les batteries je n’ai jamais eu de gros problèmes. A part le trépied que je n’arrivais plus à déplier  parce que la neige elle avait gelé, ça avait fait de l’eau et ça a regelé après, on arrivait plus à déplier le pied.

Régis : Là, il faut vraiment le ramener à 20° chez soi pour pouvoir retrouver l’ouverture.

Guillaume : Voilà, il n’y a pas le choix.

Régis : Quel type d’objectifs tu as, tu travailles avec quels objectifs, toi ?

Guillaume : Du coup, moi je suis en Canon. Là j’ai un 7D, j’avais un 50D avant, je garde toujours les deux, parce que le 7D il fait de la vidéo, donc je filme avec un appareil photo aussi, comme ça, ça me permet de faire les deux sur le terrain. Après j’ai un 100-400, le 100-400 de Canon, l’inconvénient c’est qu’il n’est pas très lumineux, il a quand même une bonne qualité. Mais par contre c’est un bon compromis en montagne parce que justement il n’est pas trop lourd, on peut assez facilement varier les cadrages par rapport à une focale fixe.

Du coup en montagne, comme de partout, si le décor s’y prête, mettre l’animal dans son environnement en composant avec toutes les lignes, les formes qu’il y a autour, c’est aussi important que d’avoir juste un gros plan de l’animal. Donc j’aime bien avoir cette possibilité de changer mon cadrage rapidement, d’avoir un objectif qui a un zoom, un 100-400. Après j’ai un grand angle, plus pour les paysages ou justement pour mettre les animaux tout petits dans ce décor immense, donc un 17-50. Après j’ai un 70 macro.

Régis : D’accord. Tu as fait une super transition par rapport à ma prochaine question. Tu as parlé un peu de ça, de mettre l’animal dans son environnement. Moi quand je vais sur ton site Internet, c’est guillaumecollombet.com tout simplement, quand je vais voir ton portfolio, tu as catégorisé tes photos d’une manière assez rare, je ne l’ai pas vu souvent.

Habituellement les photographes classent les images sur leur site par espèce, c’est-à-dire renard, lapin, etc. Toi, non, tu as procédé différemment. Par exemple tu as fait par ambiance, milieu, sommet, plaine, clairière. Et c’est dans ces catégories qu’on voit apparaitre les espèces. Pourquoi tu as fait ce choix en fait d’aborder ton site par des thèmes d’ambiance ou de milieu ?

Guillaume : Déjà j’ai essayé de chercher quelque chose qui était un petit peu plus original. Je me suis demandé comment sortir un peu de l’ordinaire parce qu’on voit assez régulièrement les mêmes choses. Ce n’est pas facile. J’ai essayé de me creuser la tête.

Régis : C’est réussi, tu vois, parce que du coup ça m’a interpellé.

Guillaume : Oui, c’est le but d’essayer de trouver quelque chose d’un peu original. Comm il y en a qui essaient de faire pour les livres, c’est dur si on fait un livre, soit on fait par espèce, par habitat ou par saison, la plupart du temps. Si on travaille plus selon les lumières, en contrejour, chose comme ça, je pense que ça peut être assez sympa. Du coup j’ai essayé de ranger plutôt par ambiance les images et d’avoir aussi une autre approche qui peut faire plutôt comme une balade, c’est-à-dire de les ranger par milieu, par altitude ou par zone naturelle où on les retrouve, sur la plaine, le bocage, la forêt, les sommets, tout ça.

Régis : De toute façon, j’ai l’impression que tu es plus à la recherche d’une ambiance et moins dans la performance photographique du toujours plus près, toujours plus net. Tu vas me confirmer si c’est bien ça ou pas. Et pourquoi ? C’est ce qui te plait ou parce que tu te rends compte que c’est ce qui le plus les gens, des ambiances ? Qu’est-ce qui fait que tu es plus attiré par ce genre de photographies-là ?

Guillaume : Je pense que c’est ce qui me plait. Je prends beaucoup de plaisir à voir ça, à composer ces images un petit peu comme un tableau, à dessiner, tout ça. C’est presque un dessin qui se fait dans ma tête. Quand on est dans le viseur, qu’on regarde, on se dit là, là ça donne quelque chose, donc on prend. Après, j’aime beaucoup quand on a des rencontres assez fortes,  où l’animal vient très près, des fois c’est sûr qu’il y a beaucoup d’émotion.

Mais je ne vais pas forcément chercher ces rencontres très proches. C’est vrai que j’aime bien observer l’animal qui évolue dans son milieu, des fois il s’approche, des fois il s’éloigne. Mais j’essaie de jouer avec tout ce qu’il y a autour pour que ça le mette en valeur. Si le décor est très impressionnant mais que l’animal il est là-dedans, ça va le glorifier un petit peu dans ce paysage.

Régis : Je suis assez d’accord avec toi. De toute façon j’ai l’impression que depuis quelques années, peut-être pas tant, je note quand même qu’on vient plutôt à ça, que les photographes qui arrivent comme toi, je pense aussi à Michel d’Oultremont mais il y en a d’autres comme Bastien Riu, ils sont dans cette veine-là, c’est-à-dire que c’est vraiment mettre l’accent sur l’artistique, mais par contre le portrait serré, brut, sans émotion, je crois que c’est un petit peu fini, ça.

Guillaume : Oui.

Régis : Il en faut, il y en a qui font ça très bien. Mais en tout cas, moi ça me parle moins. J’ai l’impression qu’on a un peu tourné la page de ce type de photographies en tout cas en animalier, et qu’on est plus maintenant dans ce que tu peux faire toi, c’est-à-dire déclencher une émotion par l’animal bien sûr mais aussi par son environnement.

Guillaume : Oui. Je pense que c’est important mais c’est des modes qui évoluent. On ne sait pas ce qui plaira en photo dans une dizaine d’années. Ça pourra peut-être encore changer. Disons qu’avant on était plus vraiment dans de la photo documentaire, et avoir un animal tout proche ce n’est quand même pas toujours facile. C’était vraiment ce que l’on allait chercher et qui était très dur. Je pense que maintenant on est plus dans l’artistique  plutôt que le documentaire. On va vraiment chercher des lumières particulières, des ambiances, des décors incroyables.

Même si on a un animal très proche, moi ça m’arrive souvent, là les bouquetins c’est un animal qui n’est pas chassé, donc on peut l’approcher très facilement, je le vois depuis que je suis tout petit, il descend même dans le cœur du village l’hiver pour manger dans les jardins, du coup là on peut s’amuser. Mais je n’ai jamais eu un portrait très classique où l’animal me regarde comme ça, c’est des cadrages un petit peu décalés où on a le museau qui nous guide vers son œil, on voit juste un œil sur la photo, des choses comme ça un peu plus originales. Je pense qu’on est plus dans une recherche artistique que vraiment avoir la photo nette de l’animal en plein soleil, le plus gros possible. Je pense que ça, ça a changé.

Régis : Oui, c’est vrai. Je trouve aussi. On en vient à ton activité du moment, celle qui doit te prendre, j’imagine, beaucoup de temps actuellement, c’est d’ailleurs comme ça que je t’ai découvert, tu es en train de réaliser un long métrage. Juste avant d’en parler plus longuement de ce long métrage-là, où est-ce que tu en es, tu as fini, tu n’as pas fini, tu es dans quelle phase pour l’instant ?

Guillaume : J’ai commencé il y a un an et demi quasiment et je vais finir le tournage à la fin de l’hiver. L’idée, c’est faire un film qui parle de la photo animalière justement, où on va voir moi, où je me mets en scène, ça parle un peu de ce métier qui est assez original. L’idée, est-ce qu’on peut en vivre ou pas. Et puis aller à la quête d’un animal qui est très dur à trouver. Donc pour faire ce film, je me suis dit que j’aimerais que mon histoire elle fasse un an. On essaie de pense le scénario avant même si on ne sait pas exactement ce que l’on va arriver à filmer avec les animaux.

Ce qui est important dans un film, c’est d’avoir une histoire. Je me suis dit, si mon film je veux qu’il dure une année complète en voyant les quatre saisons, il me faut au moins deux ans de tournage pour filmer au moins deux fois chaque saison pour avoir suffisamment de matière pour mettre tout ça dans le film. A l’image, ça paraitra comme si c’était une année mais en vrai il y a deux années de tournage pour arriver justement à faire ça.

Régis : C’est fabuleux ce travail en amont que tu peux faire. Le titre c’est « Le lièvre blanc – Histoire de photographe animalier ». Je te cite d’ailleurs, je reprends une de tes phrases sur ton site Internet. Tu dis : « Ce film raconte l’histoire d’un jeune photographe, donc toi évidemment, qui essaie de faire de sa passion son métier. » C’est vraiment complexe de montrer que c’est difficile d’être photographe animalier, tellement complexe qu’il a fallu que tu en fasses un film ?

Guillaume : Avec le master de cinéma que j’ai fait, j’ai pu me rendre compte de ce qu’était vraiment comment on faisait un film, quelle histoire on arrivait à raconter et c’est vrai que des fois les histoires vraies, on arrive mieux à les mettre en valeur. Moi j’étais au moment où j’avais fini mes études, j’ai commencé à travailler un peu à droite à gauche en même temps que je testais mon activité pour pouvoir me lancer.

Je me suis dit si je fais un film sur ce métier, en ce moment il y a tellement de monde qui s’intéresse à la photo animalière, mais en vivre c’est quand même très dur. Du coup je me suis dit, s’il y a un moment où on peut faire un film sur est-ce qu’on se lance ou pas dans la photo animalière et est-ce qu’on peut en vivre, c’était le moment où moi je ne savais pas ce que j’allais devenir non plus, j’ai choisi de filmer en même temps que je me lançais dans ce métier.

Régis : Je trouve que c’est un bon angle, ce n’est pas un gros mot, mais il faut appeler un chat un chat, il y a un côté marketing qui est intéressant, c’est-à-dire qu’il y a beaucoup de gens qui font un petit peu la même chose, donc je vais essayer de trouver un angle d’attaque un peu différent. Et je trouve que ce que tu as fait là, c’est une bonne idée, c’est montrer ton histoire à toi qui sera forcément vraie, et en général les histoires vraies, les gens aiment beaucoup ça. Mais ce n’est pas le seul fil rouge de ton histoire.

Donc tu suis un animal tout au long du film  et c’est le lièvre blanc. Alors pourquoi lui, ça m’a un peu intrigué parce qu’il y a quand même des animaux qui sont un peu plus populaires, un petit peu plus prestigieux dans l’esprit des gens, je pense à l’ours, alors l’ours il n’y en a peut-être pas dans les Alpes, mais au loup par exemple, qu’est-ce qui t’a amené à choisir le lièvre blanc ?

Guillaume : Justement parce qu’on n’en parle pas beaucoup. On l’a presque oublié de l’imaginaire collectif, même ici en montagne. Avant les gens allaient un petit peu à la chasse au lièvre variable, il a régressé, les gens ne vont plus à la chasse, on sait à peu près qu’il est là mais on trouve même très peu d‘études sur cet animal, il y en a quasiment pas, il y a une personne du Parc National des Ecrins qui m’a contacté, qui avait écrit une thèse dessus, c’est les seules recherches qu’on a en France.

Régis : Ça veut dire que, moi par exemple, quand je me suis lancé sur les lapins de garenne, c’était très facile, il y a une multitude de documentation sur cet animal-là, c’est très facile de se documenter, d’avoir des choses sur lui. Toi, ça a dû être difficile justement de savoir son mode de vie, de savoir quand est-ce qu’il fallait aller le voir. Là pour le coup, c’est vraiment l’expérience du terrain qui t’a aidé ?

Guillaume : Oui, voilà. C’est une espèce qui est très compliquée, très dure à voir, et en même temps, c’est vraiment ce que je cherchais. Ce qui m’intéresse vraiment sur cette espèce, on en parle très peu et ça m’intéresse d’aller vers ces espèces un petit peu oubliées. D’un autre côté, c’est une espèce qui est très dure à voir, qui est nocturne, qui vit dans un milieu qui est assez compliqué parce que même en plein hiver on peut le trouver en haute montagne jusqu’à 3000 mètres. Il ne bouge que la nuit, il est dans un milieu difficile d’accès.

En plus il est blanc, il passe sa journée caché, blanc au milieu de la neige, c’est très dur de le trouver. Mais je trouve que ça renforce la quête si l’animal est difficile, dans le film ça va être vraiment l’histoire de la quête. Donc ma quête à moi qui essaie de vivre de la photo animalière et qui essaie de ramener des images peu courantes de cet animal qui vit là-haut sur les sommets et qu’on connait très peu.

Régis : Tu avais une certaine pression parce que finalement décrire ton activité de photographe animalier professionnel naissant, tu avais le matériel sous la main, c’était toi, c’était assez facile, mais par contre tu avais une certaine pression par rapport au lièvre, tu pouvais ne pas le trouver, tu pouvais ne pas le voir ?

Guillaume : Oui. Même là, c’est très dur cet hiver, j’y passe beaucoup de temps pour très peu d’images. Mais ce qui est joli dans un film, c’est vraiment cette histoire de la quête, comprendre toute la démarche qu’on fait pour arriver au résultat qu’on veut. Du coup, ça renforce vraiment l’idée du métier de photographe animalier où parfois pour certains sujets on peut être amené à passer beaucoup de temps sans forcément du résultat. Des fois on a des prises de risque qui ne sont pas faciles à gérer.

Régis : Ton film on pourra le voir, je crois que tu l’as dit, au mois de mai, non ?

Guillaume : En juillet.

Régis : D’accord. Où est-ce qu’on pourra le voir ou se le procurer ? Comment tu comptes diffuser ton œuvre ?

Guillaume : Je pense le sortir en DVD et le proposer en compétition dans tous les festivals de films animaliers, de films de montagne, de films sur l’environnement qu’on trouve un petit peu partout dans toute la France, et même à l’étranger. Après j’aime bien aussi le côté projection artisanale, donc là c’est plutôt dans les Alpes pour l’instant. Je vais le projeter dans beaucoup de stations de ski, de petits villages.

De plus en plus maintenant les festivals photo proposent quelques projections de temps en temps, je pense que ça peut intéresser pas mal de monde pour faire des petites projections un petit peu partout en France. Ça reste dun cinéma artisanal, ça ne sort pas dans les grandes salles. Mais après une fois que je l’aurai fait vivre de ma façon artisanale, peut-être que je le vendrai après à des petites chaines de télé.

Régis : C’est ce que j’allais te dire, une chaine comme France3 région.

Guillaume : Ils peuvent être intéressés, oui c’est possible. Mais j’aime bien le faire vivre avant de façon artisanale, le valoriser un peu en DVD, tout ça. Parce qu’après la télé touche très vite beaucoup de monde

Régis : C’est plus impersonnel aussi. Mais c’est vrai que tu es un peu comme un artiste musicien, c’est-à-dire que tu crées ta musique et là en l’occurrence tu crées ton film, et après tu pars un peu en tournée, tu vas à la rencontre du public, c’est un peu la même démarche qu’un musicien qui ferait des concerts, c’est un peu ça ?

Guillaume : Voilà. Oui, c’est une démarche assez originale mais après ce qui est intéressant, j’ai pris le parti de faire ce film de façon autoproduite en essayant de trouver des partenaires, j’ai même fait un appel à don sur Internet, les gens m’ont beaucoup soutenu pour ce projet, donc c’est vraiment super et je les remercie. Du coup, ça m’a permis d’avoir cette liberté de vraiment faire un film d’auteur parce que c’est dommage quand on a une production télé, c’est que parfois on a d’énormes moyens qui sont mis en œuvre, on a des images qui sont super mais par la contrainte, parce qu’il faut que ça rentre dans des formats télé classiques, on a des films qui sont un petit peu ennuyeux, qui se ressemblent un peu tous, des documentaires qui sont un petit peu monotones parfois parce qu’on a trop de contraintes de la production.

Régis : Qui impose un rythme plus élevé ?

Guillaume : Qui impose parfois de modifier le scénario pour que ce soit beaucoup plus  télégénique, on n’est moins libre. Après on a des dates vraiment très strictes à respecter pour sortir le film à telle date, tout ça. Ce n’est pas les mêmes contraintes, mais les budgets sont plus conséquents. Moi pour ce premier film, ce premier long film, je vais essayer de faire un film à mon image, il plait ou il ne plait pas mais ça fait une petite carte de visite pour la suite.

Régis : C’est un très beau projet, c’est sûr. Côté technique maintenant, quels conseils pourrais-tu donner pour réussir une petite vidéo animalière, je ne parle évidemment pas d’un long métrage comme toi tu veux faire, mais juste une belle vidéo comme ça à partager par exemple ? Quels sont les deux, trois conseils ou à l’inverse les deux, trois choses à ne pas faire absolument ?

Guillaume : C’est vrai que maintenant, vu qu’on peut filmer avec les boitiers, il y a de plus en plus de monde qui peut faire des petites vidéos. C’est très intéressant à faire de voir bouger ces animaux qu’on a d’habitude figés sur la photo. La première chose qui est très importante, on ne filme quasiment jamais à main levée, sauf au grand angle si on est bien stabilisé, mais à partir du moment où on a un téléobjectif pour voir les animaux, on est toujours sur trépied.

La vidéo, il faut être vraiment très stable. Après, par rapport à la photo, quand on est sur le terrain, c’est vrai qu’en photo chaque photo peut être la bonne, on a nos réglages, on refait tout le temps notre cadrage, c’est vraiment de saisir l’instant, alors qu’en vidéo il faut déjà imaginer en séquences, c’est-à-dire si on voit une chose superbe mais qu’on filme du début à la fin sans jamais s’arrêter, ça peut être assez compliqué de valoriser ça, de monter ça.

Quand on a un animal qui arrive dans la forêt, par exemple un chevreuil qui se balade en forêt, on peut filmer juste un petit peu devant lui pour le laisser rentrer dans l’image, ça permet d’amener un premier plan. On compte au moins 10 secondes dans notre tête à chaque fois pour être sûr d’avoir un plan qui est suffisamment long pour être tranquille pour le montage. Et ce qui est très important après, c’est de varier les cadrages, c’est-à-dire on va essayer de grossir s’il est près, on a un gros plan sur lui, le plan est suffisamment long, on compte dans notre tête, je fais un plan plus large, et simplement d’avoir plusieurs valeurs de plan, ça peut se faire très rapidement quand on est sur le terrain, mais simplement d’y penser ça permet d’avoir un montage qui est plus dynamique.

Régis : Rien que ça déjà, ça pourrait éviter à ceux qui s’essaient à cette pratique-là, la vidéo sur le terrain, ça peut leur éviter comme tu l’as dit de filmer une succession de plans, les uns après les autres, où c’est toujours la même chose.

Guillaume : Ça ne sert à rien de filmer 10 minutes le même animal sans jamais changer de cadrage, si on ne le laisse pas sortir de l’image, c’est plus dur. Il vaut mieux essayer d’avoir un début, quelque chose d’un peu plus dynamique au milieu en montrant où il est ou en montrant ce qu’il fait plus proche, et le laisser sortir. Là, simplement on a une petite histoire dans notre tête et du coup ça fonctionne.

Régis : Ça peut durer 2-3 minutes mais ça peut faire une petite vidéo sympa à partager sur son site si on en a un.

Guillaume : Oui. C’est très agréable pour échanger avec les gens, c’est super. Après en vidéo, il y a le son qui est souvent très important aussi, une très belle image si on a un son qui n’est pas bon, on va avoir l’impression que l’image elle n’est pas terrible. La plupart du temps pour les vidéos de quelques minutes, on peut choisir une belle musique, on peut essayer de monter en rythme, de caler un peu les images sur la musique, ça fait des petites vidéos qui sont faciles à faire qui peuvent être très belles. Sinon essayer d’avoir un son, moi je rajoute un micro pour avoir une meilleure qualité sur le boitier, ou j’ai même parfois des prises de son extérieures que je rajoute dessus.

Régis : C’est-à-dire que tu triches un petit peu, le son qu’on peut avoir dans ton film ce ne sera pas forcément le son du moment ?

Guillaume : Quand je fais les prises de son, pour qu’il n’y ait pas d’erreurs naturalistes, je vais dans les zones où j’ai filmé, par exemple en ce moment en forêt de mélèzes enneigée mais il fait beau, une prise de son le matin ou dans la journée ou le soir. A chaque fois je dis quand est-ce que j’ai fait les prises de son. Ça, ça sert dans le montage vidéo. Mais c’est vrai que dans tous les films, surtout en animalier, on a rarement du son direct qui est utilisé parce que même des fois on entendait les caméras qui tournaient.

Régis : Donc on enlève le son de la caméra, filmé le jour de la caméra, mais on va rajouter un son extérieur qui peut ne pas être pris le même jour exactement mais en tout cas dans les mêmes conditions, dans le même endroit.

Guillaume : C’est ça. Après, si on a des bons micros, avec un petit enregistreur externe, on aura un son qui est meilleur que celui de l’appareil photo et ça va vraiment donner du volume à la vidéo, ça va créer de l’espace. Du coup c’est très important. C’est des choses que j’ai apprises à l’Ecole de cinéma. Moi j’ai fait un film où on se plonge dans la peau d’un animal, c’était un film assez original, on ne sait pas quel animal c’est, c’est ce qui nous tient le long du film, c’était un court métrage.

Là dessus j’ai dû beaucoup travailler sur le son, en fait il y a les prises de son d’ambiance, en forêt, là c’était de la stéréo, je n’ai pas le même son qui sort de l’enceinte gauche et de l’enceinte droite. Mais ça crée déjà du volume, on est dans la forêt, il y a un pic qui tambourine sur un arbre au fond à droite, il y a une mésange qui crie toute proche à gauche, il y a un espace qui se crée tout autour de nous, donc ça met en valeur la vidéo.

Après quand on se déplaçait dans la peau de l’animal, là c’était plutôt du son mono que je mettais, des bruitages de pas, de respiration, etc. qui étaient toutes empilées, on peut vraiment empiler des couches de sons pour donner de la matière à la vidéo. Et quand on a un son qui est mono, il sort pareil des deux enceintes et du coup on a l’impression qu’il est au milieu de l’image, on a l’impression vraiment d’y être.

Régis : Quand tu as dit tout à l’heure que la vidéo était plus complexe que la photographie, avec tout ce que tu viens de me dire sur le son, je veux bien te croire maintenant, il n’y a pas de problème. Ça fait déjà 40 minutes qu’on est ensemble, je le dis à chaque fois, mais c’est vrai que c’est passionnant et que je ne vois pas trop le temps passer. Dans ton film il y a quelque chose d’assez original et je trouve de vraiment fabuleux, c’est la bande sonore. Tu as fait appel à un musicien qui fait de la musique très originale. Est-ce que tu peux justement nous en parler un peu de ce côté-là de ton film s’il te plait ?

Guillaume : Oui. Moi j’aime bien déjà travailler avec les gens que j’ai pu rencontrer et qui ont chacun des talents dans leurs divers domaines. Même pour la vidéo, il y en a qui viennent m’aider sur le tournage de mon film parce que ça ne se fait jamais tout seul, un gros film. Du coup je fais appel aux compétences de chacun. J’ai eu la chance de rencontrer un jeune compositeur qui fait vraiment des musiques, je trouve, qui peuvent apporter de l’émotion. Parce que la musique elle peut aussi avoir un sens dans un film, elle nous fait réagir selon les séquences, elles peuvent aggraver les choses, rendre triste ou joyeux une scène, donc c’est assez important.

Du coup en plus Anthony, c’est Anthony Touzalin qu’il s’appelle, il est venu un petit coup sur le lieu du tournage, à mon chalet, on s’est baladé en forêt où je vais aussi chercher le fameux lièvre variable pour qu’il s’imprègne vraiment du milieu. Il tenait à ça vraiment, de se rendre compte de ce décor, pour composer la musique du film. C’est vraiment quelque chose d’artistique, il faut qu’il ressente ça pour composer. Autour de mon chalet, on s’est amusé à enregistrer des sons avec tout ce qu’il y avait autour de nous. Il a composé une petite musique simplement avec, c’est surtout des percussions, c’est taper sur des bouts de bois, des pierres, des choses comme ça ou des éléments du chalet.

Donc ça lui sert de base pour faire une musique et c’est des sonorités parfois que l’on n’arrive pas à retrouver avec un instrument. Du coup, il s’est amusé à composer quelque chose juste avec les sons qu’on avait enregistrés là-haut. Après, dans le film, ça sera plus mélangé avec des instruments, tout ça, mais il peut se servir parfois d’éléments naturels, on peut ne pas s’en rendre compte mais ça apporte un peu plus de matière dans le film qui colle au milieu dans lequel on est et qui nous fait vraiment ressentir quelque chose d’original dans le déroulement du film.

Régis : La démarche est originale et le résultat est vraiment réussi parce que tu as fait des préannonces. Comment tu as dit ?

Guillaume : C’est juste des aperçus du tournage.

Régis : Des aperçus, c’est ça. Et à un moment donné, justement, tu as filmé le travail d’Anthony, c’est vraiment original, et le résultat est réussi. Je fais une petite parenthèse aussi, un petit lien avec un autre réalisateur aussi, un cinéaste animalier, Roland Fournier-Christol, qui dans ses films s’attache aussi souvent les services du même compositeur, c’est Yannis Dumoutiers. C’est vrai que la musique apporte vraiment une dimension supplémentaire, accompagne l’image et même parfois plus, la soutient.

Guillaume : Oui.

Régis : C’est vraiment important. Je te remercie beaucoup Guillaume pour ce bon moment passé ensemble.

Guillaume : Oui. Merci à toi.

Régis : J’espère vraiment que ton projet va aboutir, ça c’est sûr, mais surtout qu’il fonctionne bien et que ça puisse te permettre d’aller au bout de tes rêves photgraphiques.

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