Dans cette interview du photographe animalier Marc Costermans, vous apprendrez :

  • le parcours de Marc Costermans
  • pourquoi il existe une « école » belge de la photo animalière, avec des photographes animaliers comme Michel d’Oultremont ou encore Philippe Moës.
  • comment photographier le martin pêcheur
  • comment faire pour obtenir un fond esthétique
  • comment faire pour photographier le martin pêcheur en vol
  • comment photographier le faucon crécerelle
  • pourquoi et comment se rendre en Hongrie chez Bence Mate

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Vous pouvez retrouver tout le travail de Marc Costermans sur son site internet en cliquant ici. Il a également un superbe portfolio sur 500px. 

Marc est passionné par la photographie animalière en général évidemment, mais surtout par la photographie d’oiseaux. Il effectue la plupart de ses photos autour de sa maison, chez lui, en Belgique. Il lui arrive aussi parfois de se rendre dans d’autres régions du monde pour assouvir sa passion de la photo animalière.

Il faut savoir que Marc se rend tous les ans depuis 2011 avec un petit groupe de photographes, en Hongrie, dans les magnifiques et célèbres affût du non moins célèbre photographe d’oiseaux Bence Maté. D’ailleurs il reste encore 2 places pour la prochaine session qui aura lieu en juillet 2016. Il est encore possible de s’inscrire ou de se renseigner en cliquant ici.

Le credo de Marc Costermans est simple : montrer ce que nos yeux ne peuvent pas voir. Autrement dit, partager et montrer au monde la beauté de la nature. 

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Voici une série des magnifiques photos prises par Marc Costermans. Vous voyez bien que c’est un passionné d’oiseaux ! 🙂

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Retrouvez ci-dessous la transcription texte de l’interview

Aujourd’hui je vous propose de passer une bonne heure avec Marc Costermans. Marc est un photographe belge, un photographe animalier bien sûr. Il est spécialisé dans la photographie d’oiseaux, et particulièrement du martin-pêcheur et du faucon-crécerelle. Il a d’ailleurs remporté de nombreux prix avec ces deux oiseaux-là. Vous allez bien sûr apprendre de nombreuses choses avec lui, mais surtout comment faire pour bien avoir un joli fond flou et esthétique pour la photographie du martin-pêcheur et aussi comment faire pour avoir un comportement intéressant avec cet oiseau. Avant de vous laisser avec Marc, je tiens vraiment à vous remercier pour votre fidélité. Vous êtes toujours de plus en plus nombreux à nous écouter. Quand je dis « nous », c’est mes invités et moi-même. Merci à tous et bonne écoute.

Régis Moscardini : Bonjour Marc et bienvenue à toi.

Marc Costermans : Merci. Bonjour Régis.

Régis : Je te remercie d’avoir accepté mon invitation pour cette interview sur Auxois Nature.

Marc : Avec grand plaisir.

Régis : Comme d’habitude, je vais être obligé de te demander de te présenter en quelques mots s’il te plait. N’en dis pas trop, gardes-en un peu pour la suite. Quelques petits mots sur toi, s’il te plait.

Marc : Je m’appelle Marc Costermans. Je suis belge. J’ai 51 ans, j’ai 3 enfants et je suis passionné par la photo depuis 1993 comme vous dites chez les Français.

Régis : Comment tu dirais ? Chez vous, il y a nonante là-dedans ?

Marc : Nonante-trois.

Régis : Mais c’est vous qui avez raison. On dit soixante-huit, soixante-neuf et on devrait dire comme vous, septante et septante-un. Nous, je ne sais pas pour quelle raison on fait soixante-dix. C’est nous qui avons tort et vous qui avez raison.

Marc : Ça arrive de temps en temps.

Régis : Avant d’entrer dans le vif du sujet, j’aimerais que tu m’expliques la différence entre le statut de photographe en France par rapport à celui qui est le vôtre en Belgique. Parce que j’ai pu lire que tu as été obligé de passer un examen pour pouvoir être photographe professionnel. C’est quoi la différence entre chez nous et chez vous ?

Marc : Maintenant c’est différent. Je t’explique. Moi j’ai passé un examen d’état simplement parce que je faisais des reportages mariage et que je vendais de temps en temps des images à des revues. On avait besoin d’un accès à la profession, exactement comme un électricien ou un plombier.

Maintenant ce n’est plus le cas. La profession n’est plus protégée comme elle l’était avant. Je crois que c’était surtout pour protéger les gens. Parce que photographe c’était pour la prise de vue et pour l’installation d’un magasin. Donc n’importe qui ne pouvait pas ouvrir un magasin photo sauf s’il avait son diplôme de photographe et un diplôme de gestion.

Régis : D’accord.

Marc : C’est pour cette raison-là que j’ai passé un examen d’état même si ce n’est pas mon métier mais je souhaitais être en ordre pour pouvoir faire des reportages en étant droit dans mes baskets et ne pas risquer un retour de manivelle.

Régis : Parce qu’en France, du coup c’est maintenant la même chose en Belgique d’après ce que tu dis, on n’a pas besoin d’avoir un diplôme de photographe. D’ailleurs je crois que le CAP de photographe en France n’existe plus au catalogue des formations disponibles. Ce n’est pas péjoratif de dire ça mais n’importe qui peut se mettre.

C’est bien ou ce n’est pas bien, il faudrait en débattre dans une autre émission, une autre interview. Mais en France il n’y a pas besoin d’avoir un diplôme pour s’installer en tant que photographe.

Marc : Je pense que ce n’est pas le cas en Belgique non plus maintenant comme ce l’était auparavant.

Régis : D’accord. J’ai une petite question que je n’avais pas prévu de te poser mais qui m’est venue il n’y a pas très longtemps. Tu fais partie des nombreux photographes belges qui sont reconnus sur la scène photographique, qui ont du talent, qui sont connus pour ça.

Il y a toi, il y a Michel d’Oultremont, il y a Philippe Moës, il y en a d’autres encore qui ne me viennent pas tout de suite à l’esprit. Est-ce que tu dirais qu’il y a une école photo animalière belge ou que tu ne sens pas qu’il y a ce genre de chose-là ?

Marc : Bonne question. Je pense déjà qu’on a une densité de population qui est bien supérieure à la France, donc statistiquement on risque d’avoir plus d’habitants au km² et donc aussi plus de photographes animaliers au km². Je ne sais pas si c’est lié à ça. Quand tu parles par exemple de Michel d’Oultremont qui est vraiment un extraterrestre, il habite peut-être à 15 minutes de chez moi.

Ce n’est pas un voisin, mais au niveau belge il y a une concentration de talent sur peu de distance. Peut-être ce qui joue, c’est qu’on a peu de rassemblements photo très diversifiés. Par exemple on a Namur et c’est pratiquement tout au niveau de grands rassemblements photo. Ce qui n’est pas le cas en France avec Montier d’un côté, le festival de l’oiseau et plein d’autres.

Peut-être que tous les photographes belges se retrouvent à Namur. Maintenant il y a deux festivals : le festival nature de Namur et l’expo Aves. Ils se sont scindés en deux. Mais les photographes se retrouvent et se connaissent bien entre eux. Peut-être que ça joue.

Régis : Je pense que ce que tu dis est juste par rapport à la concentration. Peut-être qu’en nombre vous êtes moins nombreux. Je ne sais pas combien il y a d’habitants en Belgique. 10 millions, quelque chose comme ça ?

Marc : On est à 11 millions.

Régis : Nous, c’est 6 fois plus. Je pense qu’il y a plus de photographes en nombre en France qu’en Belgique. Mais le fait que vous soyez rapprochés les uns des autres facilite les échanges. Tu disais que Michel n’était pas loin de chez toi. Un coup de fil, vous pouvez faire une sortie ensemble, vous échangez des astuces, des trucs ensemble.

Ça participe peut-être à une progression un peu plus importante que ce que nous pourrions faire chez nous en France, c’est possible.

Marc : On va vite se croiser. A la fin du mois, Aves, puis le festival en octobre. Je suis sûr que je vais voir des gars comme Philippe Moës, Franck Renard, Michel d’Oultremont et plein d’autres. Ils seront là, c’est sûr.

Régis : Exactement. Ça doit participer à ça, à cette espèce d’émulation générale des photographes belges en ce moment. Je saute du coq à l’âne. J’aimerais savoir en quoi ton voyage de noces a été l’élément déclencheur de ta passion pour la photo animalière.

Tu ne l’as peut-être pas dit quand tu t’es présenté mais tu aimes la photo depuis très longtemps, mais la photo animalière c’est parti de ton voyage de noces. Où c’était et en quoi ça a démarré cette passion chez toi ?

Marc : Pour faire un jeu de mots, effectivement notre voyage de noces ça a été un déclic au niveau de la photo animalière. J’ai reçu un télé pour notre voyage de noces, un 400 mm. Pour les plus jeunes, c’était un 400 mm Leica mais la mise au point était liée à l’allongement de l’objectif.

C’était excessivement compliqué. Il n’y avait pas une bague tournante. Alors que c’était un objectif fixe, c’était lié à l’allongement. En même temps, c’était une très bonne optique, un 400-5.6. Bien sûr on parle d’argentique à ce moment-là. Le fait d’avoir eu un télé 400 mm pour un voyage de noces aux Etats-Unis, dans les grands parcs animaliers, nature.

C’est sûr que quand on est à Yellowstone et qu’on a un 400 mm dans les mains, on risque d’y prendre goût. Ça a été mon cas en tout cas.

Régis : Je comprends. Tu avais quand même choisi plutôt un voyage orienté nature. Tu n’as visité les grands buildings, les grandes métropoles américaines ?

Marc : Tout à fait. On a privilégié les grands parcs nationaux. Je ne vais pas tous les citer parce qu’on est resté très longtemps, on est resté 40 jours. On a pris un bain de nature. J’avais un trans-standard et un 400 mm.

Suite à ce voyage, j’ai acheté mon premier reflex qui était en argentique, un petit Canon 500 et un trans-standard ainsi qu’un 75-300, comme matériel photo en 1993.

Régis : Une fois retourné chez toi, tu as démarré à photographier les animaux qui étaient autour de chez toi. On va y venir par rapport aux animaux qui te passionnent en ce moment et sur lesquels tu travailles beaucoup.

Avant ça, tu as longtemps photographié avec un 200 mm qui ouvrait beaucoup, à f/2.8 je crois. Mais tu as dit qu’il fallait que tu investisses dans des focales plus importantes. J’aimerais savoir pourquoi.

C’est que tu étais frustré de ne pas pouvoir faire les images que tu avais en tête ou c’était un peu pour faire comme tout le monde dans le sens où tu aimais la photo animalière, donc il fallait au moins un 300 ou un 400 mm. Qu’est-ce qui t’a fait basculer et passer à une focale plus importante ?

Marc : Sans doute il y a beaucoup de raisons. J’ai envie de raconter une petite histoire qui s’est réellement passée dans notre jardin. J’étais effectivement équipé d’un 70-200/2.8 que j’utilisais pour pas mal de reportages.

Régis : C’est très polyvalent. Pour des reportages, c’est parfait.

Marc : Tout à fait. C’était un objectif extraordinaire qui avait une luminosité et un très bon piqué. Dans notre jardin, on a eu un passage régulier, je ne sais pas si tu vois ce que c’est un merle leucique ?

Régis : Non. Le merle évidemment oui, mais leucique pas du tout ?

Marc : Il était un peu comme l’aigle américain. Donc il y avait un merle totalement noir avec une tête blanche qui venait régulièrement dans le fond du jardin. Avec mon 70-200 j’étais vraiment trop loin. Il était souvent au milieu du jardin et je n’avais pas de moyen de l’approcher.

Je me suis rendu compte suite à cet événement et bien d’autres, celui-ci est une anecdote, que j’avais besoin d’avoir une plus longue focale pour pouvoir fixer l’animal. Pour la petite histoire, j’ai acheté un 300 f/4 Canon, excellent objectif, et un petit peu plus tard un 500 Sigma qui ouvre à 4.5.

Mais malheureusement est-ce que le merle a été attrapé par un chat ou quoi, je n’ai jamais pu le fixer sur une pellicule, en argentique. J’ai eu sur le capteur ce bel oiseau qui est plutôt rare.

Régis : Tu as acheté un objectif pour pouvoir mieux photographier, en tout cas être plus proche de ce merle blanc, en partie blanc, mais tu n’as pas pu le faire parce qu’il avait disparu avant que tu puisses le faire.

Marc : Voilà. Le fait qu’il y ait une tache blanche, il attire l’attention des prédateurs.

Régis : Certainement. C’est un défaut.

Marc : Blanc et noir c’est plus visible. Mais aussi beaucoup de prédateurs pensent qu’il y a une anomalie donc il a un handicap ou une maladie, donc il est faible. Il va doublement attirer l’attention.

Régis : Tout à l’heure je disais qu’il y avait deux animaux qui te passionnaient particulièrement. Deux oiseaux : le martin-pêcheur et le faucon-crécerelle. Deux oiseaux qui ne se ressemblent pas vraiment. Ils n’ont pas le même biotope, ils ne vivent pas au même endroit, ils n’ont pas les mêmes proies. Et pourtant tu es attiré de la même façon. Qu’est-ce qui t’attire chez eux ?

Marc : Le martin-pêcheur, je trouve que c’est le plus bel oiseau que nous avons en Belgique. En France vous avez la chance d’avoir le guêpier, le rollier que nous n’avons pas. La huppe est parfois de passage mais c’est vraiment anecdotique en Belgique. En termes de bel oiseau coloré.

En plus pour les photographes animaliers, c’est un oiseau farouche, petit, discret, il n’est pas comme la petite mésange bleue ou charbonnière que nous pouvons voir quasi tous les jours dans nos jardins. C’est un oiseau qui me fascine aussi par ses comportements puisque quand il sort de l’eau, comme il n’a pas de pattes palmées, il ne sait pas nager, il sort de l’eau quasi en vol. Je trouve ça fascinant qu’il vole pratiquement pour pouvoir s’extirper de l’eau, aussi un peu avec sa vitesse.

C’est petit à petit que j’ai découvert des lieux près de chez moi. Quand je dis près de chez moi, à vol d’oiseau, on est à 10-15 kilomètres, pas plus. Je ne vais pas plus loin pour avoir quelques spots pour cet oiseau-là. Comme tu le sais, j’ai fait énormément de photos de martin-pêcheur. Paradoxalement j’ai énormément de photos de martin-pêcheur alors que je n’ai jamais approché un loup au niveau spot photo. J’en ai déjà approché au niveau observation mais je n’étai spas convié à faire des photos à cet endroit-là. Malgré ça, j’ai beaucoup d’images sur des lieux de pêche. J’ai tourné un film martin-pêcheur sur exclusivement des lieux de pêche.

Le martin pêcheur est un excellent défi pour le photographe animalier parce qu’une fois qu’on a de belles images de cet oiseau posé sur des branches, c’est sympa. Mais passé au niveau où on veut des actions, des actions en vol, des actions de pêche, des actions de sortie d’eau, là ça devient beaucoup plus compliqué parce que c’est un oiseau très vif. Donc c’est un excellent défi pour le photographe animalier.

Régis : Le martin pêcheur posé sur son perchoir, c’est plutôt facile parce qu’il ne bouge pas, là c’est assez simple techniquement. Mais par contre ça devient plus compliqué si on veut sortir un petit peu de la photo classique du martin posé sur son perchoir.

Juste une petite chose : il faut savoir que le martin-pêcheur c’est un excellent indicateur  d’un bon état des eaux environnantes. En gros, si un martin-pêcheur est dans une rivière ou dans une portion de rivière, ça veut dire qu’il y a du poisson et que la rivière n’est pas trop polluée.

Marc : Tout à fait. J’imagine que c’est la même chose en France. Il y a une très grande amélioration de l’état de nos rivières de manière globale grâce à beaucoup de centres d’épuration. Malheureusement un point négatif reste en tout cas en Belgique : c’est l’état des berges.

Comme ils nichent principalement dans des berges, il y a beaucoup de berges qui sont bétonnées ou un aménagement grillagé pour les soutenir, mais qui empêche le martin d’avoir des lieux de nidification. Donc ça reste un problème malgré que la qualité de l’eau ait augmentée.

Régis : D’accord.

Marc : Pour le faucon-crécerelle, là aussi il y a un changement lié à l’usage des DTT, c’est le cas en Belgique depuis qu’il y a eu des interdictions, le faucon-crécerelle et d’autres prédateurs en haut de la chaine se sont développés. Je ne connais pas les chiffres exacts.

La population de faucons-crécerelles s’est fortement améliorée en Belgique, je ne connais pas les détails non plus, à la diminution ou à la suppression totale du DTT, remplacé par d’autres produits tueurs d’insectes. Le faucon-crécerelle, il y en avait autour de chez nous, moi je suis dans un biotope campagnard, ce sont des champs, des prairies autour de chez nous.

On n’a pas une grande diversité d’oiseaux strictement dans notre jardin, mais avec des passages de faucons-crécerelles ou de buses qui allaient à l’arrière de notre jardin, dans la prairie et j’ai tout simplement installé un nichoir que j’ai construit moi-même pour les faucons-crécerelles. La troisième année, il y a un couple qui est devenu locataire de ce lieu.

Régis : Tu as été patient. Ça veut dire que tu ne t’es pas dit la première année, ça ne marche pas, j’arrête, je passe à autre chose. Tu as persévéré, tu as continué à donner la possibilité à un couple de venir. C’est arrivé au bout de 3 ans. Il faut quand même persévérer ?

Marc : Tout à fait. Là les faucons sont venus. J’ai d’autres nichoirs par exemple pour les chouettes qui n’ont pas encore été occupés depuis peut-être 8 ans. J’ai diversifié aussi les nichoirs dans notre jardin parce qu’évidemment en tant que photographe le plus simple c’est de pouvoir photographier très proche de chez soi pour bien connaitre le biotope, connaitre les habitudes des espèces. Ce qui est le cas pour le faucon-crécerelle.

Régis : Tu as vraiment installé ton nichoir à quelques pas de ta maison. Ça veut dire que le faucon-crécerelle n’a pas trop peur de s’approcher des habitations, comme il a pu le faire ?

Marc : Chez nous, on a un jardin assez long.

Régis : Techniquement, très concrètement, il est à combien de mètres de chez toi, pour savoir si les gens qui nous écoutent peuvent aussi faire pareil chez eux ?

Marc : Chez nous, il est loin, c’est à 80 mètres de la maison. Comme il y a peu d’anfractuosités, de grottes, etc., il y a pas mal de faucons qui vont nicher dans des anfractuosités de fermes ou des vieux châteaux, là c’est à côté des habitants. Ils vont accepter le va-et-vient des tracteurs.

Il y a beaucoup de faucons-crécerelles tout près des fermes, vu qu’il y a des vaches, il y a des grains, il y a aussi des micromammifères. Lui, finalement il y trouve plus d’avantages que d’inconvénients d’être près des êtres humains, en tout cas avec une activité de ferme. Nous dans le jardin, il va avoir un passage parce qu’on tond la pelouse. On a une cabane à outils qui est juste en dessous du nichoir. Au pire il est là sur un perchoir, il s’envole et il revient un peu plus tard.

Le point délicat, c’est juste au moment de l’installation du couple. J’ai constaté que là c’était un moment délicat. Mais une fois qu’ils sont installés, ils vont peut-être s’envoler et j’ai envie de dire, au fur et à mesure de la saison, ils acceptent ma présence de plus en plus près.

Pour donner une idée, en milieu de saison, à 30 mètres à vol d’oiseau la femelle qui est un peu moins farouche que le mâle m’accepte. Mais quand elle a des jeunes, elle peut m’accepter à 15 mètres parce que je viens tous les jours et qu’elle s’est habituée à moi. C’est farouche dans la nature mais à proximité humaine, ils s’habituent petit à petit.

Régis : Ça peut être une méthode de photographie qui marche en général avec pas mal d’animaux. C’est le fait d’habituer l’animal à notre présence. Le bon côté des choses, c’est qu’on peut s’approcher, eux ils peuvent s’approcher de nous parce qu’ils ont confiance.

Je ne sais pas à quoi ils nous identifient mais en tout cas on peut s’approcher plus et eux peuvent s’approcher plus. Ce qui est difficile, c’est qu’il faut venir très régulièrement, très fréquemment et ça prend donc beaucoup de temps.

Il y a un petit bémol, c’est qu’il faut se méfier de ça parce que, si je prends le cas du renard par exemple, si on habitue un individu renard à la présence du photographe, à la présence humaine du photographe, il ne fera peut-être pas la différence entre un photographe et un chasseur si on veut vraiment aller d’un extrême à l’autre.

Mais il faut avoir ça en tête, si on habitue un animal à la présence humaine, ça peut être mauvais pour l’animal.

Marc : Tout à fait. Je pense aussi que c’est bien de souligner qu’on peut se montrer de loin, et s’approcher petit à petit et d’observer les signes de dérangement de l’oiseau. C’est-à-dire si par exemple il se nettoie les ailes, qu’on approche et qu’il continue à se nettoyer, on sait que c’est bon.

S’il s’arrête et qu’il nous regarde, c’est que ça le dérange déjà. Là, il y a à respecter l’oiseau et peut-être faire quelques pas en arrière pour ne pas aller au-delà d’une distance respectable et de sécurité pour l’oiseau et pour d’autres espèces.

Régis : C’était exactement ce que disait Michel d’Oultremont dans le dernier épisode de la série des interviews. Il disait la même chose par rapport à une chouette lapone. Il disait, j’avance, j’avance, je regarde précisément ce qui se passe dans son comportement et si je vois un changement de comportement, je m’arrête et je peux même faire quelques pas en arrière pour lui signifier que je ne lui veux pas de mal et que j’essaie de ne pas la déranger.

Marc : Chaque espèce a une distance de sécurité. Alain Balthazard qui fait beaucoup d’approches en voiture m’expliquait qu’il y a des buses qui sont totalement parano et à 100 mètres elles vont fuir, d’autres à 20 mètres qui s’en foutent comme de l’an 40.

Régis : Bien sûr.

Marc : Ce que j’ai fait par la suite, j’ai construit carrément une cabane à 6 mètres de hauteur, à hauteur du nichoir mais à une distance respectable. Donc je suis à une distance de 12 mètres du nid. Là aussi c’est un point vraiment pour les auditeurs très délicat, la photo au nid est vraiment délicate et difficile à manier, justement parce que ça peut occasionner du dérangement.

Mais là c’est une cabane avec un affût photo. Je vais juste monter et descendre, préférentiellement quand aucun oiseau n’est sur son perchoir. Je reste dans mon affût, je ne bouge pas, les oiseaux ne me voient pas du tout. C’est une certaine proximité. La photo près d’un nid, si on ne connait pas, c’est à proscrire. Si on connait bien une espèce, elle est acceptable mais à manier avec grande précaution.

Régis : Parce que le risque, c’est tout simplement la destruction de la nichée ou l’abandon de la nichée par les parents. Donc ça peut être dramatique, pour une espèce.

Marc : Tout à fait. Les animaux privilégient toujours la survie de l’espèce, quitte à suspendre la survie de l’un des œufs ou de leur progéniture. Ils pourraient très bien laisser des œufs ou leur progéniture.

Régis : J’aimerais qu’on s’attarde un petit peu, s’il te plait, sur le martin-pêcheur parce qu’on ne pourra pas traiter comment photographier le martin et le faucon sur la même émission, ça prendrait trop de temps. Donc j’aimerais qu’on passe un peu plus de temps sur le martin-pêcheur.

Tu l’as dit, le martin c’est un animal qui est vraiment couru par les photographes, qui est assez présent, qui est assez courant. Tu l’as dit aussi, comme les eaux des rivières sont de meilleure qualité, il y a un peu plus d’individus. C’est mieux pour pouvoir les photographier. On voit beaucoup de photographies sur Internet, même dans des expositions, dans des manifestations, de martins-pêcheurs.

Est-ce que toi tu essaies de te faire plaisir avant tout ou au contraire tu essaies de te démarquer de ce que fait la plupart des gens ? Quelle est ta démarche par rapport à ça, pour le martin-pêcheur ?

Marc : J’ose dire que mes premières images de martin-pêcheur étaient pour me faire plaisir de voir ce bel oiseau. J’ai beaucoup de photos relativement simples, classiques. Après avoir réalisé quelques images comme ça la première saison, je me suis posé beaucoup de questions pour savoir quoi faire pour réaliser d’autres types d’images.

Pour moi, un type d’images, c’est au niveau de la gestion des couleurs, c’est dire on voit souvent le martin dans des fonds verts ou plus sombres. Là je voulais diversifier et avoir des fonds de couleurs différentes. Ça je vais expliquer par la suite si ça t’intéresse. Les comportements, voir des attitudes, des mouvements. Là c’est un oiseau plus compliqué si on veut l’avoir au niveau du mouvement.

Régis : Je résume un tout petit peu ce que tu viens de dire. C’est intéressant mais ça peut être adaptable à n’importe quel type d’animal. Si on estime que beaucoup de photos ont été faites sur une espèce en particulier mais qu’on aimerait quand même photographier cette espèce-là parce qu’on a une opportunité près de chez soi et que ça nous plait aussi.

On peut se diversifier ou sortir de l’ordinaire soit en essayant de changer la couleur du fond ou la couleur de l’ambiance, ou alors si on ne peut pas ou si on n’a pas envie ou si on veut faire autre chose, on peut essayer de photographier un comportement ou des comportements qui n’ont pas encore été trop photographiés. Ce sont deux variables.

Marc : Tout à fait. Alors je disais tout à l’heure que le martin-pêcheur était un oiseau farouche, c’est un inconvénient. Par contre le gros avantage par rapport à d’autres oiseaux, ou d’autres espèces animales,  c’est un oiseau qui accepte assez facilement la venue d’un affût photographique.

Moi je photographie exclusivement avec un affût photo que je déplace. Actuellement j’ai un affût chaise, parce que c’est très pratique. Je viens avec mon matériel, je m’installe rapidement, je mets mon trépied et je photographie. Je peux changer d’orientation assez facilement.

Régis : Tu veux dire que cette espèce de grosse verrue camouflage, le fait que tu la déplaces, que tu la mettes à un endroit ou à un autre, qui peut changer d’un jour à un autre, ce n’est pas gênant pour le martin ?

Marc : D’après mon expérience, le martin il s’en fout complètement des changements dans son entourage. J’ai même envie de dire le contraire. Pour la tente affût, c’est relativement neutre pour lui. Mais par exemple typiquement, moi je photographie plus sur un étang, à un endroit de l’étang où il y a un petit courant qui amène des poissons, à cet endroit-là il n’y a pas d’arbres, et donc il n’y a pas de perchoir.

Si j’installe un perchoir quel qu’il soit à un endroit potentiellement intéressant pour le martin, il viendra le visiter. Moi je voyais des poissons à l’œil nu, il y avait des petits poissons. Si je mets un perchoir-là, le martin va venir utiliser ce lieu de pêche.

Il vient visiter son territoire mais un perchoir en une semaine de temps il va venir le visiter. Donc il ne faut pas beaucoup de temps pour que le martin situe qu’il y a un nouveau perchoir intéressant sur son territoire.

Régis : C’est intéressant, ça.

Marc : Il peut être une branche moussue que l’on a choisi, certains photographes font ça, ils mettent un deuxième appareil photo sur un trépied, le martin viendra se poser sur l’appareil photo. C’est ça qui est paradoxal.

C’est un oiseau farouche mais en même temps très conciliant parce que si c’est un lieu intéressant, lui que ce soit une branche moussue ou un appareil photo ou un parapluie ou une bouteille de bière, il va se poser dessus si c’est un lieu de pêche intéressant.

Régis : D’accord. Tu disais tout à l’heure que par rapport au faucon, si tu voulais photographier les faucons au nid, qu’il fallait y aller avant qu’il arrive et sortir après qu’il soit parti. Est-ce que c’est pareil pour le martin ou tu peux venir à n’importe quel moment de la journée, en faisant abstraction de la lumière du jour ? Ce que je veux dire, est-ce qu’il y a un moment particulier pour aller se mettre dans sa petite tente affût ou s’installer sous sa petite cache ? Est-ce qu’il y a une règle par rapport à ça ?

Marc : Je distinguerais sans hésiter un photographe qui aurait un affût près d’un nid, avant le lever du jour, parce que le martin-pêcheur ne va pas l’apercevoir nécessairement là où il se trouve, il va être près de son nid et si on s’approche avec tout son barda, on va le déranger. Ce qui n’est pas le cas avec les faucons parce que j’ai un perchoir qui est bien dégagé, je vois le perchoir de loin.

Avec le martin-pêcheur il peut être un peu n’importe où, près d’un nichoir ou près d’un lieu de nidification du martin, je dirais qu’il faut faire très attention et faire le moins de dérangement possible. Par contre sur un lieu de pêche, le fait d’arriver on va faire fuir le martin s’il est là. Il nous voit de loin dès qu’on est à 50 mètres de distance. C’est le cas pour moi.

Au moment où j’entends le cri, il pousse un cri d’alarme pour dire, tu me déranges ou il y a danger. C’est déjà trop tard. Mais moi je ne l’ai pas vu, on l’entend, on voit son vol. Donc on s’installe et là, si c’est un lieu intéressant, il va revenir ½ heure, une heure plus tard.

Régis : On peut venir sans problème, on n’est pas obligé de venir très tôt le matin ou de repartir très tard le soir. En tout cas sur un site de pêche, il n’y a pas de souci de ce côté-là. Moi, je confirme ce que tu dis. Je l’ai vécu il n’y a pas très longtemps.

J’étais allongé et je photographiais en bord de rivière des bergeronnettes grises, j’étais à l’attente, il ne se passait pas grand-chose, et tout d’un coup j’ai vu une espèce de flèche bleue passer devant moi, elle s’est posée, quand je dis elle, c’est le martin-pêcheur évidemment, il s’est posé à 5 mètres de moi sur un  perchoir.

Evidemment je n’ai pas bougé parce que je ne pouvais pas faire autrement et il n’y avait pas grand-chose à faire sauf à le regarder. Je l’ai regardé, il est reparti peut-être au bout de 5-10 minutes. Mais je n’étais pas forcément très bien camouflé, j’étais juste allongé avec une toile de camouflage sur l’appareil, un petit peu sur moi, mais ce n’était pas énorme. Mais il était là, il était à 5 mètres.

C’est vrai qu’il est comme tu dis, il est certainement farouche, il part dès qu’on arrive mais une fois qu’on est installé, il peut s’approcher assez près.

Marc : Voilà. Je parlais au niveau fond de couleur.

Régis : Fond de couleur. Si on veut se démarquer de ce que fait un peu tout le monde, comment on peut changer un peu de fond de couleur. Comment tu fais ?

Marc : Comme ce que j’ai dit précédemment, si on a un lieu dégagé, que ce soit sur une rivière ou un canal, quand je dis dégagé, c’est sûr qu’installer un perchoir juste à côté d’un arbre, à moins que ce perchoir soit beaucoup plus intéressant pour le martin, mais la probabilité qu’il veuille tout d’un coup aller sur ce perchoir plutôt qu’une des branches de l’arbre est faible, tandis que si c’est le seul lieu d’arrêt, d’observation à 30 mètres de distance d’un autre, d’un arbre ou d’un arbuste, c’est sûr que c’est beaucoup plus intéressant.

Mais si c’est dégagé, on peut donc installer le perchoir un mètre à gauche, 5 mètres à droite, justement en fonction du fond. Je vais donner un exemple. En fin d’automne, là où je vais faire des photos, il y a une butte avec je ne sais pas ce que c’est comme type de sapins, toutes ses épines sont tombées et sont un peu d’un brun orangé qui est pas mal du tout.

Mais cette butte quand elle est éclairée et que c’est le fond de la photo, ça va donner un orangé, brun clair orangé suivant la luminosité, suivant que le soleil vient directement dessus ou pas. Ça va donner un fond qui est une tapisserie. Le perchoir sera mis dans la direction de ce fond qui est très intéressant.

Régis : Ce fond-là, il est très flouté par rapport à la grosse ouverture que tu vas utiliser. On ne verra pas les épines une à une mais ça va être comme tu l’as dit une espèce de tapisserie floutée, mélangée de ces couleurs-là.

Marc : Voilà. Donc là tout d’un coup on a une photo de martin toute simple où il est sur un fond uniforme comme ça orangé. J’ai fait la même chose avec un arbre qui a des feuilles vraiment rouge vif à l’automne, et comme le martin était à l’ombre et l’arbre au soleil, j’ai dû surexposer.

Le fait de surexposer, le rouge est devenu rose au niveau du fond. Tout d’un coup j’ai fait des photos de martin-pêcheur sur un fond rose. A l’origine c’est juste un rouge qui a été éclairci dès la prise de vue.

Régis : La surexposition tu l’as faite pour avoir le martin-pêcheur bien exposé, tu avais le martin bien exposé et le fond surexposé, ce qui a donné une couleur un peu inattendue ?

Marc : Tout à fait. J’ai fait d’autres photos avec cet arbre dans le fond où j’ai fait l’inverse, j’ai sous-exposé pour avoir un rouge très vif tirant presque vers le mauve et un coup de flash pour déboucher le martin-pêcheur qui est bien éclairé. Ça marche aussi. Ça donne tout à fait d’autres couleurs que le rose alors que c’est exactement le même fond.

Régis : Ces essais-là, j’imagine que tu ne les fais pas en présence de l’animal, sinon il partirait, il s’enfuirait. Mais tu y vas, tu fais des tests, tu n’es pas forcément camouflé, tu te déplaces sur les berges. Comment tu t’y prends pour ces tests de couleur-là ?

Marc : C’est vrai qu’avec le numérique c’est super facile parce qu’on voit directement sur le capteur. Après, le photographe qui est un petit peu habitué, il sait directement que si le sujet principal va être à l’ombre, si l’on veut qu’il soit bien éclairci, on va surexposer l’oiseau et donc le fond va devenir plus clair.

C’est quelque chose qu’on sait très bien. Moi je photographie le perchoir. Si le perchoir il est clair, je sais qu’il va être plus clair que l’oiseau. Si c’est un brun foncé, il va être un peu plus sombre. Si c’est une mousse, là ça correspond plus ou moins à l’oiseau, quoique ça dépend si c’est éclairé par le soleil ou pas. C’est comme si on intégrait, là ça va être +1, là ça va être -1/3. Tu vois ce que je veux dire ?

Régis : D’accord. Là c’est l’expérience.

Marc : L’expérience. Et on se trompe de peu. Moi je fais quelques essais sans l’oiseau. Quand l’oiseau est là, souvent je corrige, mais on est à 1/3 ou 1/2IL de différence, mais pas plus, de ce que je voulais faire dans ma tête.

Régis : D’accord. Ça c’était par rapport à la couleur, ce n’est pas la couleur du martin qui restera toujours la même, c’est la couleur du fond, évidemment. Pour le comportement maintenant, soit on photographie sur le perchoir, là ça peut être très esthétique mais ça ne raconte pas grand-chose et ça a été vu et revu, sauf si on met de la couleur comme on l’a dit tout à l’heure, une couleur un peu originale derrière.

Mais pour le comportement, comment faire, je pense que c’est assez complexe techniquement, mais est-ce que tu peux nous dire un peu tes petites astuces à toi, comment faire techniquement pour pouvoir prendre le martin-pêcheur en vol, parce que c’est ce que tu fais ? Quand on va sur ton site Internet, il y a un lien en dessous du petit rectangle d’écoute où on voit tes photos, comment tu fais pour faire ces photos fabuleuses de martin-pêcheur en vol ? C’est assez incroyable !

Marc : Je vais déjà dire le plus simple qui est d’ailleurs valable pour tous les oiseaux, ça parait tout bête. S’il y a un perchoir et s’il vient sur le perchoir, l’oiseau il va venir en volant. Ça parait évident. Là on se dit, si le perchoir est plus petit, comme un parapluie qui a une longue verticale, s’il est planté dans le sol, la verticale est longue mais la courbure est relativement petite.

Imagine qu’on mette une petite branche qui est un lieu d’atterrissage horizontal de 20 centimètres. L’oiseau va se poser sur 20 centimètres. Mais si on fait une mise au point avant le perchoir, l’oiseau va passer forcément dans ce plan. Et là on peut dire, j’ai envie d’essayer de l’avoir de face au moment où il se pose sur le perchoir. Là c’est plus difficile dans le sens que l’oiseau, surtout le martin-pêcheur comme il vole vite, il va toujours faire un freinage en écartant ses ailes et il va passer en dessous du perchoir.

Il y a moyen, en baissant son appareil photo bien en dessous du perchoir, en l’orientant un petit peu vers le haut, d’voir des photos de martin-pêcheur quand il freine 20-30 centimètres avant le perchoir. Ça c’est une façon de faire. Là je fais un préréglage, même en ayant des autofocus rapides, il ne faut pas se leurrer, un autofocus ne va jamais attraper juste ce moment qui va très vite.

Régis : Tu fais ta mise au point avant manuellement. Dans le viseur, ton perchoir il est flou ?

Marc : Oui. Je vais passer juste en dessous du perchoir si je ne veux pas avoir le perchoir. Moi je fais ça très manuellement, de façon très simple, je vais mettre un bâton ou une branche qui est dans la nature, je ne me trimballe pas avec ça, je vais mettre un bâton tout droit, 30 centimètres avant le perchoir, je fais la mise au point sur ce bâton-là, je débranche mon autofocus, j’enlève le bâton.

Puis le martin-pêcheur va passer par là. Cet appareil photo, 9 fois sur 10 il est commandé à distance par un déclencheur souple. Ce qui permet d’avoir un appareil pour la prise de vue en vol parce que je vais peut-être avoir un bon vol ou une photo, il y a 10-20 venues sur le perchoir, donc il y a beaucoup de déchets. Et j’ai un autre appareil dans mon affût pour pouvoir faire des photos où il est posé. Sinon ce serait un peu frustrant de passer de nombreuses séances sans rien n’avoir.

J’utilise souvent deux boitiers, un pour la prise de vue telle quelle pour un comportement qui peut toujours subvenir, il vient, il se nettoie les ailes ou il y a une pêche, ou il est en train de manger, un deuxième martin qui vient, tandis que l’autre boitier est orienté vers un endroit comme je te dis, dans le sens de la venue, face à l’oiseau. Le plus facile, c’est de côté. Donc s’il vient vraiment d’un lieu précis, fatalement il viendra d’un des deux côtés.

On choisit un des deux côtés par observation. On a observé qu’il vient plus facilement de ce côté-là. On peut le faire à 30 centimètres du perchoir, à 50 centimètres. Plus on s’éloigne du perchoir, plus c’est difficile évidemment de prévoir le lieu de passage. Si tu poses un perchoir à un mètre de la mangeoire, il y a des oiseaux qui vont faire le trajet entre la mangeoire et le perchoir.

C’est comme ça que beaucoup de photographes font beaucoup de photos d’oiseaux en vol à cet endroit précis où il y a une pré-mise au point. Je dirais que c’est une façon facile sans disposer de matériel performant.

Régis : Sans avoir de déclencheur infrarouge, sans piège photo, on peut faire des choses très intéressantes, avec un petit peu d’astuce comme tu l’as dit. Est-ce que tu fermes un petit peu le diaphragme pour bénéficier d’une profondeur de champ un peu plus importante ou tu vas quand même privilégier la vitesse de d’obturation ?

Marc : La grande question, en vol, chaque fois c’est qu’effectivement pour avoir toute la netteté sur l’oiseau, quand il ralentit ça va un petit mieux mais sinon quand il a un vol rapide, si on veut l’avoir parfaitement net, on va atteindre des vitesses au-dessus du 1/2000 de seconde.

Régis : Ça peut être assez difficile à avoir même en pleine journée, le 1/2000 peut être un peu difficile à avoir.

Marc : Voilà. Comme en plus le martin est souvent à l’ombre, donc si on est au 1/2000 à l’ombre et qu’on ferme en plus l’objectif à 5.6 ou voire 8, on est obligé de monter tellement en iso que c’est bruité. Moi j’ai contourné un peu la chose en faisant des photos en vol dans un lieu dégagé sur lequel j’ai posé un perchoir.

Au niveau lumière, je suis à des vitesses plus élevées, simplement parce qu’il n’y a pas d’ombre. Si c’est éclairé par le soleil, j’ai facilement des plus grandes vitesses et là je ferme un petit peu, 5.6 ou 6.3, 8 c’est rarissime au 300 mm que j’obtienne plus que ça. Ce qui est très intéressant mais très difficile avec le martin, si on a des vitesses plus basses, 1/500 de seconde, bien sûr on va avoir le mouvement des ailes, mais le risque c’est que la tête soit floue.

Je dirais que c’est une grande règle en photo, en vol en tout cas mais en posé encore plus, les ailes sont floues aucun problème, si l’œil est net, la tête est nette, c’est mieux, mais si l’œil est net et la tête légèrement floue, je pense que ça passe sans problème. Mais ce qui est très important c’est les yeux.

Régis : Je suis sur ta page 500pixels, je la mettrais également en lien, n’hésitez pas à cliquer dessus pour aller voir. Il y a une photo de martin en vol, tu es à 1/2000 de seconde et pourtant le bout des ailes est un peu flou. Ça ne gêne pas du tout, ce n’est pas ça que je veux dire.

C’est vraiment qu’il faut avoir des vitesses élevées, très élevées si on veut avoir tout de net, les ailes également en vol. Pour figer le mouvement des ailes, il faut avoir des vitesses assez élevées.

Marc : C’est particulier, celle-là « flight again ». Tout comme d’autres oiseaux, comme le faucon crécerelle, le martin-pêcheur fait parfois du vol stationnaire. J’ai eu la chance d’avoir quelques séries de vol stationnaire. Si tu regardes « flight again » et celle juste avant qui s’appelle « slow motion », c’est très intéressant parce qu’on a deux photos quasiment prises au même moment, l’une au 1/2000 de seconde et 1600 iso, et l’autre à 125 iso et au 1/80 de seconde.

Régis : Dans quel ordre tu as pris les photos ? Tu as déjà pris « flight again » à haute vitesse pour assurer le coup et tu t’es dit, maintenant que j’ai ça dans la boite je vais tenter des choses avec le « slow motion » ? Ça a été quoi ta démarche, là, si tu t’en souviens ?

Marc : Tout à fait. Oui, je m’en souviens très bien. Je n’ai pas eu souvent l’occasion d’avoir un vol stationnaire à portée d’objectif. J’en ai observé maintes fois sur un étang parce qu’il y a une vue dégagée, parfois je le vois à 30 mètres, 20 mètres, mais ce n’est pas à portée d’objectif. Là, il était peut-être à 5-6 mètres, je crois de mémoire que c’est au 500 mm, j’en ai une au 500 l’autre au 300.

Je l’ai eu à deux moments. Pour mémoire c’était en hiver, j’avais la glace à un endroit précis. C’est un lieu où il est venu plusieurs fois faire du vol stationnaire. Ça c’est un petit truc, il est venu faire du vol stationnaire au-dessus des 4 m² qui étaient dégagés de la glace.

Régis : En fait c’était sa mangeoire. La mangeoire du martin, c’était la glace cassée sur la rivière ou sur le lac ?

Marc : Tout à fait. C’est là que l’étang se déverse dans une rivière et ça génère un petit peu de mouvement. J’ai juste un peu plus dégagé la glace qui était déjà épaisse. Là j’ai eu plusieurs vols stationnaires. J’ai essayé au 1/4000 de seconde, au 1/2000, au 1/2500, j’ai progressivement diminué la vitesse pour avoir des essais complètement différents. La plus basse vitesse, c’est celle-là, c’est 1/80 de seconde.

Régis : Là, tu as quand même réussi à avoir la tête nette. C’était une sacrée prouesse. Bravo Marc. Bien joué pour ça. Je vous invite, vous qui nous écoutez, à aller voir le site de Marc. Il y a le lien en dessous. Est-ce que tu as prévu de faire une exposition bientôt ? Où est-ce qu’on pourrait te rencontrer ? On est au mois de septembre 2015. Quelle est ton actualité dans les 6 mois qui viennent ?

Marc : Très bientôt, pour nos amis belges, il y a le festival nature de Namur. Cette année j’expose au festival nature de Namur du 10 au 18 octobre. Je serai donc sur le lieu principal, dans le hall avant le cinéma, sur Namur. Là j’aurai une expo qui s’intitule « envolées lumineuses », c’est soit le mouvement ou la lumière. Il y a beaucoup de photos prises à contre-jour avec du mouvement dans cette expo qui aura lieu à Namur.

Régis : Marc, avant de te laisser, j’ai une petite question pour toi qui va forcément intéresser pas mal d’auditeurs. Je crois savoir que tu es la seule personne francophone actuellement qui organise des voyages pour aller en Hongrie chez le célèbre super photographe Bence Maté. Est-ce que tu peux nous en parler un petit peu plus, s’il te plait, de ce que tu fais là avec lui ?

Marc : J’ai eu la chance d’y aller la première fois en 2009. Très peu de francophones y allaient. C’est suite à mon premier séjour que lui m’a proposé, es-tu intéressé d’amener des groupes et de bénéficier du voyage. Ce que j’ai trouvé très intéressant. Il pousse de plus en plus à ce que des groupes cohérents débarquent, notamment pour la langue, parce que se retrouver à 6, 7, 8 photographes francophones, plutôt qu’un Hongrois, un Roumain, un Tchèque et un Danois, pour pouvoir faire l’interface.

C’est-à-dire que beaucoup souhaitent partir là-bas, ils ont 36.000 questions à poser sur le matériel, sur comment prendre l’avion, comment mettre le matériel dans l’avion, quels vêtements prendre. J’ai déjà fait 9 séjours d’une semaine là-bas en Hongrie chez Bence. C’est avec beaucoup de plaisir que j’y retourne chaque année.

Le seul francophone, peut-être qu’il y en a en Suisse qui font des voyages. Mais pour le moment, je dis bien à ma connaissance, il n’y a pas un nom qui me vient, quelqu’un qui fait régulièrement des voyages. Donc on est un petit groupe de francophones, pendant une semaine généralement il y a entre 12 et 17 affûts photographiques dans des conditions extraordinaires qui sont à notre disposition.

Régis : Tu organises ça. De manière très terre à terre, combien ça coûte ? Combien de temps vous partez ? Comment on fait pour te contacter si on est intéressé ? Quelles sont les démarches à faire ?

Marc : Quelqu’un qui voudrait y aller en direct chez Bence, malheureusement il a augmenté son tarif, c’est 295 euros par jour et par personne. Par contre de passer en groupe, c’est moins cher, c’est 275 euros par jour et par personne. Quand je dis par jour et par personne, tout est compris, c’est en pension complète, on a un guide sur place qui nous conduit à 4h du matin.

Il vient nous chercher quand on le souhaite après un petit coup de téléphone, en absence il nous rappelle, parce que la ligne n’est pas bonne, parce qu’on veut rentrer. Tout est fait pour le photographe. Il y a des frigos ouverts où on se sert pour manger à l’heure qui nous convient en journée.

Régis : Ce sont des affûts 3 étoiles ?

Marc : Oui, il y a beaucoup d’affûts 3 étoiles dont un, je dirais, 5 étoiles. 2 affûts qui sont sous l’eau, on est assis dans un fauteuil de ministre et on est sous l’eau, un peu une vue comme dans un affût flottant pour ceux qui en on fait, si ce n’est que là on est au sec. Bence a prévu un système de tuyauterie pour amener des poissons, donc il y a régulièrement des pêches à portée d’objectif.

Des fois tellement proches que moi il m’est arrivé de photographier, c’était en hiver, je ne voudrais pas tromper les photographes en disant qu’il y a ça en été, mais en hiver j’ai photographié des pygargues au 16 mm, tellement ils étaient proches.

Régis : Même au-delà de la photo, les conditions d’observation doivent être vraiment géniales. Combien de temps ? C’est une semaine j’imagine ?

Marc : C’est vraiment 7 jours pleins, généralement du samedi au samedi, une demi-journée le premier jour, on va faire l’après-midi du samedi en arrivant et le dernier jour on va terminer par une matinée du samedi. Donc je pousse les gens à prendre un avion tôt le matin pour y aller et retour le soir.

Généralement les horaires d’avion de Paris ou de Bruxelles, voire de Marseille correspondent plus ou moins pour Budapest. Donc on s’arrange pour faire le trajet ensemble avec un minibus pour le transfert de l’aéroport. Sur place, il y a facilement en une semaine entre 40, 50, parfois un pic à 60 espèces dans de bonnes conditions photographiques.

Ce qui est pas mal. Mais je suis sûr que quelqu’un qui ferait un affût flottant, il y a plus de diversité. Ici à chaque session on a des rapaces comme des buses, des autours, éperviers en passant par des rolliers, il y a 5 affûts à rollier cette année. Malheureusement cette année les guêpiers ne sont pas venus.

C’est la première fois en 15 ans, ce sera peut-être pour l’année prochaine. Il y avait un affût à huppe qui fonctionnait, c’était très sympa. Bien sûr pour les oiseaux d’eau : héron, grande aigrette, cigogne noire. Des petits passereaux plus sympas mais si vous allez sur ma page 500pix, ce que vous voyez en gris c’est pris d’office chez Bence Maté.

Régis : Quel est le prochain départ, le prochain voyage ? Est-ce qu’il y a encore des places ? Est-ce qu’il faut te contacter par mail ? Comment on fait ?

Marc : Prochain départ : mi-juillet. Du 9 au 16 juillet. C’est plutôt tard dans la saison pour privilégier les actions du rollier, le guêpier je le laisse faire, huppe deuxième nourrissage, martin pêcheur il est revenu cette année, j’espère que ce sera aussi un deuxième nourrissage. Je crois qu’il ne reste que 2 places pour ce voyage. Pour me contacter, le plus simple c’est par mail : marc.costermans@hotmail.com. Tu peux mettre un lien en dessous.

Régis : Il faut se dépêcher pour pouvoir y aller. Merci beaucoup Marc pour toutes ces informations, pour tout ce que tu nous as dit, tout ce que tu nous as appris. A très bientôt j’espère.

Marc : J’espère te rencontrer en live comme on dit.

Régis : En direct, ce serait bien.

Marc : Ce serait sympa. Bonne continuation à toi et félicitation pour ton boulot qui est accessible à plein de gens. A très bientôt.