Je voudrais aujourd’hui partager avec vous une petite expérience photo toute personnelle qui devrait vous servir. Enfin j’espère ! 🙂
Je suis toujours admiratif des photographes animaliers qui font preuve de grande créativité. Ceux qui ne se contentent pas juste de photographier les animaux sans aucune réflexion artistique. Cela peut aller de la mise en scène assumée pour mettre en valeur l’animal (qui lui reste bien sauvage !) comme le fait très bien Bastien Riu. Mais ça peut-être aussi utiliser des règles de compositions extrêmes et originales (donc plus vraiment des règles !) comme le font parfaitement Michel d’Oultremont ou bien encore Fabien Gréban. Ou bien encore il peut s’agir aussi de considérer que la prise de vue ne s’arrête surtout pas après le déclenchement : le post-traitement étant une partie intégrante de l’acte photographique. L’interview d’Alain Pons m’avait ouvert les yeux à ce sujet.
Bref !! Vous l’avez compris, je me demande souvent ça : comment font ces photographes animaliers (et tellement d’autres encore, suffit d’aller sur le site de 500px ou de Whytake) pour avoir ces idées créatives ! Je maîtrise la technique photo, j’ai les connaissances naturalistes nécessaires pour les animaux que je suis, je peux me dégager du temps, j’ai le matériel photo qui va bien … à priori tous les signaux sont au vert !
Bah non, pas tous. Je vous l’ai dit. Il me manque une certaine folie créatrice. Je n’ai même d’ailleurs jamais réellement cherché à en avoir. J’ai très longtemps pensé que la fibre artistique était innée. Vous êtes artiste ou vous ne l’êtes pas. Et comme mon parcours de passionné est plutôt à chercher du coté du sport (à faire hein ! Pas devant la télé … enfin plus trop 😉 ), du coté des sciences naturelles, du coté du matériel photo et des outils numériques en général, ma culture artistique est disons … quasi inexistante. D’où ce statut quo dans mon esprit : « Régis tu n’es pas un artiste dans l’âme, laisse à d’autres le soin de trouver des idées. Contente toi de bien photographier les animaux sauvages ! » .
Enfin ça, c’était avant. Car j’ai changé ! 🙂 . Bon je m’emballe … alors disons que j’ai fait une découverte qui m’a ouvert les yeux sur ma soi-disante incapacité à être créatif. J’ai saisi que rien n’était figé ! J’ai saisi que moi aussi j’avais la capacité à créer des images originales, créatives.
Voici comment : en photographiant encore, encore et encore ! Wahou !!! Quel scoop. 🙂 Je vais développer, évidemment !
C’est en forgeant qu’on devient forgeron
Adapté à la photo animalière, cette expression bien connue pourrait être sans surprise « c’est en photographiant les animaux qu’on devient photographe animalier ».
Je vais vous raconter comment une toute petite séance photo de rien du tout dans mon jardin m’a beaucoup apporté. Elle m’a permis d’imaginer pas moins de trois projets ! Trois projets photos qui devraient pas mal m’occuper pour les semaines à venir ! 🙂
L’autre soir, donc, je descend dans ma pelouse avec mon reflex, mon trépied et mon objectif photo fétiche pour une petite séance sans prétention. Juste histoire de me dégourdir les doigts. Et aussi pour le plaisir quand même ! J’ai en tête une idée de photo à faire. Un couple de mésanges charbonnières niche sous ma terrasse, à coté d’un pied de glycine. Laquelle offre de bien jolis perchoirs, orientés pile à l’Est. Parfait pour une photo de mésange en contre-jour au coucher de soleil. J’en ai déjà fait quelques unes, comme celle ci-dessous. Aussi, je décide de renouveler l’expérience. Tout en me disant « bon, tu en as déjà fait des comme ça, mais c’est joli, alors continue ! »
Je me positionne, place mon trépied, peaufine mes réglages … et j’attends. Sauf que, une fois n’est pas coutume, le passereau n’est pas venu là où je l’attendais. En gros, les deux mésanges se sont posées à peu près partout autour de la glycine, sauf là où je voulais ! En temps normal, j’aurais fait comme d’habitude, je serais remonté dans mes appartements, un peu déçu mais pas trop. Sauf que ce soir là, j’ai décidé de rester. J’ai décidé de photographier quand même. Photographier quoi ? Rien de précis ! Juste rester à … naviguer à droite et à gauche, dans les 500 m2 de ma pelouse, à m’amuser, sans but particulier.
Quelle riche idée j’ai eu là !! J’ai dû rester une quarantaine de minutes à photographier à peu près tout ! Grâce à ça, j’en ai tiré 3 idées de projet photographique. Les voici ! Ah, juste une dernière chose. Les photos que vous allez voir là sont des brouillons, des tests. Des photos qui sont à l’origine des idées que vous allez découvrir. Elles sont donc très perfectible évidemment !
Idée Photo #1 : la mésange dans le rond du soleil
Un peu plus haut j’écrivais que les mésanges n’ont pas daigné se positionner là où je voulais. J’en ai alors profiter pour prendre des clichés à vide. Comprendre sans l’oiseau. Merci le numérique 🙂 car j’ai pu immédiatement sur l’écran constater qu’une trouée de branchages dans la glycine correspondait à l’emplacement du soleil couchant.
Vous devez penser que j’aurais pu le constater sans prendre la photo. Comme ça, à l’oeil nu. Et bien non ! C’est le résultat de la prise de vue avec les réglages de contre jour qui m’a montré ce potentiel. Sans prendre la photo, à l’oeil nu et même seulement l’oeil dans le viseur ne me permettait pas de voir cette possibilité. Une grande ouverture associée à une mesure d’exposition sur la zone lumineuse m’ont offert le cliché ci-dessous.
Je n’aurais jamais pu voir ça sans prendre la photo. En constatant le résultat, j’ai tout de suite eu l’idée d’intégrer (d’essayer d’intégrer !) une mésange (le mâle ou la femelle, je m’en fiche 😉 ) dans cette trouée avec comme fond lumineux le soleil couchant. Imaginez un peu ! Une mésange rentrant pile dans le cercle orangé du couchant entourée de branchages en ombre chinoise.
Une belle création artistique. Pour cela, je dois au préalable effectuer quelques aménagements. Le premier sera de supprimer deux ou trois petites branches gênantes. Le second sera de me placer de manière à obtenir le soleil juste au-dessus du perchoir naturel.
Idée Photo #2 : la fourmi qui grimpe en contre-jour
Ne croyez pas que la glycine est mon arbre favori (c’est le chêne en fait 🙂 ) ! Mais celle longeant le pilier de ma terrasse est une vraie autoroute à fourmis. Enfin son tronc. Ce doit être des fourmis Lasius Niger, l’espèce la plus présente dans nos jardins. Oh … faudra un jour que je vous présente ma colonie de fourmis. 🙂
Je m’approchais de la glycine pour couper les branches gênantes évoquées plus haut, quand je vois, par dizaines, des fourmis empruntant le tronc du végétal. Je pense qu’habituellement j’aurais juste observé le manège des insectes. Car oui, je suis capable de ça : observer des minutes entières le cheminement des fourmis. 🙂 Mais ce soir là j’étais en mode Photo ! Je continue donc avec mon 300 mm pour tenter des petites choses en proxiphotographie. Vous savez, la photo qui est entre la vraie macro à la mise au point très rapprochée et la photo classique.
Je shoote plusieurs fois, je regarde le résultat sur l’écran (et re-vive le numérique !!), et ho, stupeur, ça me donne une image que j’adore. En tout cas avec un saré potentiel ! Car pour l’heure je ne suis bien sur pas satisfait du tout. Mais il y a un chouette truc à faire je le sens !
Par contre, il va falloir contourner les difficultés que j’ai identifiées :
- améliorer la mise au point
- se creuser la tête pour trouver une composition intéressante
- louer un objectif macro pendant 7 jours pour 30 € … parce qu’avec le 300 mm je sens que je vais être frustré 😉
Idée Photo #3 : les moucherons volants en contre-jour
Je continue donc mon petit tour de jardin, je lève les yeux pour voir un peu les avions qui passent. Tiens, au passage, rien à voir avec la photo animalière. Connaissez-vous l’application Flight Radar 24 ? Sur tablette et smartphone, elle permet de savoir en temps réel tout des avions passant au-dessus de nos têtes ! Ça sert à rien, je vous l’accorde, mais j’adore savoir que l’avion que je vois est parti de Rome pour aller à Londres, que c’est un A 320, qu’il vole à 850 km/h et qu’il arrive à destination dans 1h30. Rigolo non ?
J’avais donc les yeux vers le haut quand je vois une nuée de petits Insectes Volants Non Identifiés, les fameux I.V.N.I ! Allez, des moucherons quoi ! 🙂 Plus par défi qu’autre chose, je tente de les photographier ! Juste comme ça, pour voir. Pour m’amuser. Et la même magie que pour la mésange à vie et la fourmi s’opère. A l’oeil nu et dans le viseur je ne vois rien d’extraordinaire. Juste des points noirs virevoltants.
Par contre, le résultat sur l’écran est à nouveau assez sympa. Je sais, la photo ci-dessous n’a rien de géniale. Les insectes sont flous, il n’y en a pas assez, la mise au point est perfectible, cette image n’est pas à garder … sauf pour l’idée ! Car c’est ce qui m’intéresse ce soir : les idées au lieu de photos réussies.
Encore une fois, je sens bien le potentiel artistique de cette scène. Une nuée de moucheron au couchant, ça a de la gueule non ? Il faudra là aussi surmonter quelques difficultés, et pas des moindres :
- réussir la mise au point
- choisir entre le flou de bougé ou le vol figé des insectes
- format paysage ou portrait, …
Mais avouez que le challenge est excitant !
Conclusion
Je ne prétends pas, loin de là, affirmer que les 3 projets photos dont je viens de vous parler n’ont jamais été fait ailleurs ! D’autres photographes animaliers, en d’autres temps et en d’autres lieu ont certainement dû sortir des images similaires. Mais je m’en fiche !!! J’apporterai ma touche personnelle, ma sensibilité, mon savoir faire. Et surtout … je me ferai plaisir ! 🙂
Enfin, j’aimerais bien qu’au travers de ce récit vous preniez conscience, comme je l’ai fait, qu’il ne faut pas cesser de photographier ! Non pas pour sortir l’image du siècle ! On s’en fiche. Mais pour faire surgir d’une scène à priori banal un cliché au potentiel certain. Voici un petit récapitulatif pour trouver vous aussi des idées créatives :
- Faites-vous plaisir avec une petite sortie photo d’un soir sans prétention,
- Ne vous fixez pas de but particulier
- Photographiez ce qui vient sans aucune idée précise … mais surtout photographiez !
- N’ayez aucune idée pré-conçue
- Vérifiez systématiquement le résultat des clichés sur l’écran
- Vous allez tout de suite voir le potentiel d’une photo
- Ne cherchez vraiment pas tout de suite à faire une photo parfaite
- Contentez-vous de l’idée, le reste viendra après
- Évitez de sortir à la lumière dure de pleine journée, cette lumière casse tout élan créatif
- N’oubliez pas d’observer ce qui est autour de vous
- Soyez Curieux
- N’oubliez pas de photographier !!
- De retour chez vous, regardez les photo sur l’ordi
- Griffonnez sur un bout de papier ou comme moi sur la photo ce qui doit être modifié, arranger, améliorer
- Réfléchissez maintenant à la photo parfaite pour vous, que vous avez en tête
- Donnez-vous les moyens de a réussir ! (je vais par exemple louer un objectif macro pour mon projet fourmi)
Et vous, vous avez des projets créatifs ?
[av_hr class=’default’ height=’50’ shadow=’no-shadow’ position=’center’ custom_border=’av-border-thin’ custom_width=’50px’ custom_border_color= » custom_margin_top=’30px’ custom_margin_bottom=’30px’ icon_select=’yes’ custom_icon_color= » icon=’ue808′ font=’entypo-fontello’ av_uid=’av-2aeyya’]
[…] écris un article qui pourrait vous aider sur la créativité en photo. J’expliquais que le meilleur moyen de développer sa créativité était de photographier, […]
Bonjour Régis,
Un bon article je dois dire. Depuis quelques temps je mettais mis à la macro. Mes prises de vue étaient essentiellement descriptives. La lecture de ton article m’a ouvert les yeux: il me manquait quelques choses à mes captures. Un peu de créativité.
J’ai donc dès le lendemain tenté l’expérience dans une prairie. Une matinée au top je te l’avoue.
Merci à toi.
Bonjour Régis,
Beaucoup de plaisir à lire votre article.
D’autant plus qu’il y a quelques jours, j’étais assis dans le jardin (avec l’appareil photo à portée de main), observant les petites bestioles bouger autour des fleurs. J’ai vu le manège d’un syrphe (Episyrphus balteatus) (la petite mouche inoffensive qui fait du surplace en l’air et qui se déguise en guêpe …) près d’une ombellifère. J’aurais voulu en faire une photo, mais impossible d’arriver à une mise au point convenable, que ce soit en autofocus ou en manuel. Ça bouge tout le temps ! Mais je vais sûrement réessayer.
Ah c’est sur qu’il persévérer. Surtout avec des petites bêtes comme ça où le risque de dérangement est de 0.
Super bel article encore une fois.
Moi aussi je suis convaincu,que je n’ai pas hérité de la fibre artistique.J’adore contempler de belles photos.J’essaie de décortiquer leurs prises de vue.J’adore lire sur toute sorte de sujet pour continuer à m’améliorer.J’aimerais tellement pouvoir en faire autant mais,je n’ai pas beaucoup le sens de la créativité.Mais,votre article m’encourage à persévérer.Je viens de changer mon appareil photo et mon objectif.Je suis extrêmement satisfaite de mon choix.Alors,je me suis remise au boulot et je travaille d’avantage à développer plus mon originalité dans mes clichés.
Un gros merci!
Salut Francine !
Content que je puisse t’aider. Vraiment ! 🙂
Bonjour à tous,
C’est assez souvent le cas dans le domaine artistique, l’inspiration est déclenchée par un élément qui vient s’installer inconsciemment devant notre regard et qui bouleverse notre scénario initial. Il y maintenant quelques années déjà, je peignais assez régulièrement, et bien il m’est arrivé très souvent d’être agréablement surpris devant le résultat d’un coup de pinceau qui au départ n’était pas du tout destiné à apporter le résultat final qui tout d’un coup se présentait devant moi.
Mais l’inverse est tout aussi vrai ne l’oublions pas ! Toutefois l’énorme avantage du numérique, c’est que déclencher souvent sans trop de préliminaires, permet de titiller cette fibre artistique qui peut nous manquer à ces moments T, et nous révéler une image qui au départ n’était pas du tout préparée, et dont tu nous as bien démontré le résultat.
Merci Régis.
Je suis content Adrien que tu fasses le lien avec la peinture et le coup de pinceau. Car ça n’est finalement pas si différent … dans l’esprit au moins !
wahou ,superbe une petite préférence pour la fourmi,je trouve la photo superbe .
Bravo et merci pour tous tes conseils et astuces
Bonjour Régis
Merci pour cet article qui me met du baume au cœur 🙂 Car moi aussi, je ne crois pas être naît avec la fibre artistique 😉
Je sors effectivement de temps en temps dans mon jardin, et je shoot au hasard en fonction de ce que je vois dans l’œilleton. Peut être encore pas assez mais à priori, je suis sur le bon chemin.
impatient donc de voir tes futures réalisations 🙂
C’est gentil merci pour ce petit message. J’ai souvent dit qu’il fallait se fixer un but pour chaque sortie de manière à ne pas papillonner mais dans ce cas précis, c’est tout l’inverse !!! Il faut partir dans tous les sens !
J’adore cet article Régis. Une situation qui est tellement vraie. Je pense que nombreux sont les photographes amateurs (moi le premier) qui sont un peu frustrés de sortir un peu toujours les mêmes photos et qui se disent que finalement la touche artistique n’y est pas. Et comme toi, j’avais un peu l’impression que cette fibre était innée. Et qu’elle ne l’était pas chez moi. J’ai eu l’occasion de faire une sortie photo ou je me suis dit, tiens là je vais shooter tout et n’importe quoi. Du coup certaines images m’ont ouvert l’esprit à des choses plus artistiques. Alors je suis assez d’accord de dire que l’esprit créatif vient en shootant… Beaucoup et surtout, des choses nouvelles, qui nous poussent à quitter nos habitudes.
Je retiens une de tes phrases que je fais mienne (et que ceux qui la liront devront aussi adopter) : » l’esprit créatif vient en shootant… »
Merci Régis pour cet article
Moi j’adore la 2éme la mésange dans le rond du soleil, il est vrai que le soleil un peu plus haut
et la mésange aussi et la ce serai parfait , la branche elle ne me gène pas du tout mais la chacun son avis évidement.
En tous cas tu nous donne encore la de bonne base ou idées .
J’avoue que je ne sais pas trop quoi choisir entre des branches autour présentes et à l’inverse un environnement nu. A réfléchir !
Bonjour Régis,
Vraiment vous êtes une mine d’informations en or, de créativité et d’imagination.
C’est un artiste qui vous le dis, car je me définis comme tel, et croyez-moi, vous êtes un vrai artiste et je cherche pas à vous faire plaisir.
Alexandre
Alors ça c’est vraiment sympa Alexandre. Comme on dit : « ça me va droit au coeur » 🙂
Très intéressant et pertinent.